lundi 31 août 2009

L'histoire de la formule 1 : 3ème épisode, Jean Alesi


Alors que je me prélassais tranquillement dans mon siège de 1ère classe dans le train dimanche dernier, j’ai été pris d’une soudaine envie d’écrire ! C’est alors que le chef de bord annonça notre arrivée en gare d’Avignon. Or, pour tout fan de F1, évoquer Avignon c’est évoquer Jean Alesi.



Jean est né le 11 juin 1964 en Avignon. Mais c’est bel et bien en Italie que remontent ses origines (son vrai prénom est Giovanni), et plus précisément en Sicile d’où est arrivé son père Frank à 19 ans. Ce dernier exerce le métier de carrossier, et bien évidemment, Jean Alesi contracte le virus de la course. Après avoir passé ses jeunes années à supporter son père pilote dans des courses de côte, Jean franchit le pas en 1981 et dispute la ligue Provence-Alpes-Côte d’Azur de karting. Brillant 2nd pour sa 1ère année, Alesi remporte le titre régional l’année suivante.
Il s’oriente ensuite vers les berlines en s’engageant dans la coupe Renault 5 Turbo. La saison est difficile, mais Jean parvient tout de même à remporter une victoire à Nogaro, dans des conditions dantesques. Déjà, Alesi s’impose comme un redoutable client sur le mouillé.

La famille Alesi se rend néanmoins compte que si Jean veut faire carrière, il faut pour cela briller en monoplace. Pour se faire, Jean participe au volant Elf, qui récompense le plus rapide des pilotes de cette session par une saison en formule Renault. Mais Alesi termine 2ème derrière Eric Bernard, que le jury a autorisé à repartir après un tête-à-queue. Malgré cette controverse, Jean tente de laver l’affront en s’alignant avec sa propre structure (composée du père de Jean, son frère José et un mécano retraité !) dans ce championnat de France de Formule Renault. L’année n’est ponctuée que d’une 2nde place, mais 1985 sera un meilleur cru puisque Jean termine 5ème du championnat, derrière des pilotes du calibre d’Eric Bernard et Erik Comas.

Son passage en formule 3 n’est donc pas étonnant, ce qui l’est davantage c’est son choix de châssis, puisqu’Alesi fait importer un châssis Dallara sur lequel il greffe un moteur Alfa Romeo, grâce à la générosité de son sponsor, la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs). Pour une fois, Jean se retrouve avec un bon matériel entre les mains, et il va en faire bon usage en terminant vice-champion derrière Yannick Dalmas.

Il est alors pris en mains par Hugues de Chaunac, le patron de l’équipe Oreca, véritable épouvantail dans le microcosme du sport auto tricolore. Mais l’équipe aligne des châssis Martini, dont Jean s’avère vite très mécontent. Alors à Nogaro, Jean emprunte la voiture de l’équipe de son frère (une Dallara), et remporte la course devant les yeux médusés de l’écurie Oreca, qui troqua séance tenante ses châssis Martini pour des Dallara ! Jean aligne alors une série impressionnante de 7 victoires, qui font de lui le champion de France de F3 1987.

Oreca, qui aligne aussi des voitures en formule 3000 le fait logiquement grimper d’un échelon en l’alignant de l’antichambre de la formule 1. Cette année de rodage est difficile, Jean ne termine que 10ème du championnat avec 11 points, et un podium dans les rues de Pau (2ème). En fin d’année, il dispute le prestigieux grand prix de F3 de Macao qu’il mène largement avant l’éclatement d’un pneu. Eddie Jordan (patron d’une écurie concurrente en F3000) remarque les exploits de l’Avignonnais et l’enrôle pour la saison 89. Jean passe du coup du mécénat de Marlboro à celui de Camel, ce qui aura de lourdes conséquences …

Au sein de l’équipe dominante dans ce championnat, Alesi va faire des étincelles en remportant le grand prix de Pau, avant de prendre la tête du championnat lors de l’épreuve suivante le 4 juin. Quelques jours plus tard, à l’échelon supérieur (la formule 1) Ken Tyrrell se débat pour trouver des sponsors. Il déniche un contrat avec le cigaretter Camel, ce qui provoque le départ de son pilote n°=1 Michele Alboreto, sous contrat avec le concurrent direct de Camel, Marlboro ! Tyrrell doit alors trouver un remplaçant à l’Italien, et pourquoi pas quelqu’un sous contrat avec Camel …

Alesi est contacté par Tyrrell, qui parvient à convaincre Eddie Jordan de lui prêter son protégé. Il va donc pouvoir faire ses débuts en formule 1, sur le circuit Paul Ricard pour le GP de France.

Qualifié 16ème à 6/10èmes de son équipier Jonathan Palmer, Jean Alesi va effectuer une course sensationnelle qui le mènera à la 4ème place finale, alors même qu’il occupait la 2ème place avant de changer ses pneus ! Ken Tyrrell peut exulter, il vient une nouvelle fois de mettre la main sur un petit prodige. Alesi est bien évidemment prolongé chez Tyrrell, même s’il continue à piloter en F3000 pour tenter d’y remporter le titre. Il réalise un autre exploit en F1 à Monza en finissant 5ème, malgré la faiblesse de son petit V8 Ford-Cosworth ; puis encore un autre à Jerez où il termine à une époustouflante 4ème place. Il est finalement 9ème du championnat avec 8 points, et cela en ayant disputé seulement la moitié des courses !
En F3000, ses victoires à Birmingham et Spa-Francorchamps lui permettent de devenir champion intercontinental, au terme d’une année en touts points éblouissante.

Et 1990 commence de la même manière, par un exploit ! Qualifié 4ème dans les rues de Phoenix, Alesi prend la tête du grand prix jusqu’au 35ème tour, moment où Ayrton Senna le dépasse … avant qu’Alesi ne reprenne la tête au virage suivant au prix d’une manœuvre extraordinaire ! Mais la petite Tyrrell-Ford V8 ne peut rien face à la McLaren-Honda V10, et Senna prend définitivement la tête du grand prix au tour suivant. Perclus d’ampoules aux mains, Alesi n’en sauve pas moins une magnifique 2ème place, synonyme de 1er podium en F1.

3 courses plus tard, Jean réalisé un nouvel exploit (encore un !) dans les rues tortueuses et piégeuses de Monaco. Qualifié à une étonnante 3ème place, Alesi harcèle le 2nd, Alain Prost, avant que celui-ci ne se retire au 30ème tour. Alesi hérite alors d’une deuxième place qu’il sauvera in extremis des assauts de Gerhard Berger, équipier chez McLaren de Senna, vainqueur de ce grand prix. Mais la suite de l’année sera plus décevante, Jean ne marquant plus aucun point. Néanmoins, avec 13 points marqués et une 9ème place au classement, le bilan est plus qu’honorable.

Au cours de cette année 1990, Jean a du faire face à un choix cornélien. Son statut de petit prodige fait de lui un pilote très convoité, notamment par Williams-Renault et Ferrari. Alesi opte d’abord pour l’équipe Anglo-française. Mais Alesi apprend que Frank Williams négocie en parallèle avec Ayrton Senna (qui ne viendra finalement pas), et se dresse alors sur ses ergots. Il devient une proie plus que facile pour Ferrari. Pour un pilote aux origines Italiennes, piloter pour Ferrari c’est comme rentrer dans les ordres, et Alesi rejoint son compatriote Alain Prost chez les rouges pour 1991. Presque 20 ans plus tard, on mesure l’ampleur de ce geste … L’équipe Williams-Renault allait en effet dominer la F1 entre 1991 et 1994 (titres mondiaux pour Mansell en 1992 et Prost en 1993). Imaginez si Jean avait fait partie de cette aventure …

Malheureusement, le rêve que l’on imaginait s’effondre très vite. La Ferrari est loin d’être une foudre de guerre, et Jean ne pourra faire mieux qu’une 7ème place au classement final avec 21 points et trois 3èmes place à Monaco, Hockenheim (GP d’Allemagne) et Estoril (GP du Portugal). A noter qu’il était en passe de remporter le GP de Belgique avant qu’une casse moteur ne le contraigne à l’abandon à 15 tours de l’arrivée.

Alain Prost licencié, Alesi voit arriver Ivan Capelli, lui aussi brillant espoir de la formule 1, pour 1992. Mais si 1991 fut décevante, 1992 sera décourageante. Au volant d’une monoplace aussi poussive que rétive, Jean n’inscrira que 18 points, dont 2 podiums à Barcelone et Montréal. La débâcle est totale pour Ferrari qui ne marque que 21 points cette année là !

Un manque de résultat fatal à Capelli, remplacé en fin d’année par le pilote essayeur Nicola Larini, avant l’arrivée de Gerhard Berger pour 1993. Mais l’année est toute aussi catastrophique, Ferrari ne marquant que 28 points et manquant de se faire passer par Ligier avec 21 points ! Alesi marque 16 points, avec pour seules satisfactions une 3ème place à Monaco et une superbe 2ème place à Monza, le temple des tifosis.

Avec l’arrivée de Jean Todt à l’été 1993, tous les observateurs attendent beaucoup de la Scuderia en 1994. Cela commence plutôt bien pour Jean qui termine 3ème du 1er GP de l’année au Brésil. Mais Jean frôle le drame quelques jours plus tard lorsqu’il se blesse aux cervicales après une violente sortie de piste survenue lors d’essais privés à Fiorano. Indisponible pour 2 grands prix, Alesi fait son retour à Monaco. La suite de l’année sera contrastée. Si Alesi effectue de belles courses (3ème à Montréal, 2ème à Silverstone), il ne parvient toujours pas à concrétiser ces promesses par une victoire. A Hockenheim, alors qu’il part en 1ère ligne aux côtés de son équipier Berger, Alesi est victime d’une casse moteur dès la 1ère ligne droite laissant l’autrichien Berger remporter la victoire, la 1ère d’une Ferrari depuis 4 ans. Dès lors, la fin de l’année sera encore plus difficile pour Jean. Il abandonne au GP de Belgique dès le 2ème tour alors qu’il était 2ème. Pire, à Monza, pour le GP d’Italie : Alesi signe sa 1ère pôle en carrière en 81 grands prix. Au départ, le français s’envole et compte 11 secondes d’avance au 15ème tour, moment de son 1er ravitaillement. Une fois l’opération effectuée, la Ferrari reste clouée à son stand, boîte de vitesses cassée. C’est un Alesi hors de lui qui s’extrait de sa monoplace jetant volant, gants et casque dans le stand Ferrari.

La seule éclaircie en cette fin d’année viendra lors du GP du Japon disputé dans des conditions apocalyptiques, ce qu’affectionne tout particulièrement Alesi. Après une bataille titanesque avec la Williams de Nigel Mansell, Alesi arrache de haute lutte la 3ème place. Avec 24 points, Alesi est 5ème du championnat, 2 places derrière Berger.

1994 fut l’année de Berger, 1995 sera celle d’Alesi. Il signe en début d’année 2 2èmes places coup sur coup à Buenos Aires et Imola, avant de renoncer à deux reprises à Barcelone et Monaco (il occupait à chaque fois la 2ème place).

Puis arrive ce fameux 11 juin 1995, jour du 31ème anniversaire de Jean Alesi. Lors de ce GP du Canada, Alesi part en 5ème position mais s’installe très vite en 3ème position avant de doubler avec autorité Damon Hill. Il se retrouve 2ème, derrière l’inamovible Michael Schumacher. On s’achemine vers une nouvelle 2ème place de Jean lorsqu’au 58ème des 69 tours prévus, Schumacher passe au ralenti ! Après un arrêt d’une minute pour identifier la panne, l’Allemand repart 8ème. Alesi est en tête ! Et il le restera. C’est sous une ovation rarement atteinte que Jean Alesi franchit en vainqueur la ligne d’arrivée de ce GP du Canada, qui le voit remporter sa 1ère victoire en carrière. Au Québec, cette victoire est chargée d’émotion : Alesi pilote la Ferrari n°=27, ce numéro cher à Gilles Villeneuve, l’enfant chéri de Berthieville décédé en 1982. C’est un Alesi en larmes qui est ramené aux stands par Schumacher, après que sa Ferrari l’a trahi … mais pour une fois après la ligne d’arrivée. Enfin, après 91 grands prix, Alesi goûte à la joie d’une victoire en F1. Cette consécration aurait pu même se répéter à Monza (il est stoppé à 8 tours de l’arrivée par un roulement de roue défaillant) et au Nürburgring (où il est dépassé à 2 tours du but par un Schumacher en état de grâce). Ce fin de championnat est aussi marqué par son engagement par Benetton-Renault, après que Jean Todt l’ai limogé pour le remplacer par Michael Schumacher. Alesi termine ce championnat 5ème, avec 42 points.

Le feuilleton Alesi-Ferrari s’achève, un nouveau débute. Alesi retrouve chez Benetton Gerhard Berger, remplacé chez Ferrari par Eddie Irvine. Ce sera la meilleure année pour Alesi, mais une année encore une fois marquée par la malchance. L’Avignonnais termine 4ème du championnat avec 47 points (c’est tout de même peu compte tenu du statut de champion en titre de son équipe). Il signe 8 podiums, mais passe encore une fois à côté de la victoire. C’est à Monaco cette fois-ci que se joue le drame. Dans des conditions piégeuses, Alesi est 2ème derrière Hill lorsque le Britannique explose son V10 Renault au 40ème tour. Sous les hourras de la foule, Jean prend la tête … avant de renoncer, encore une fois, suite au bris d’une suspension. Il laisse la mort dans l’âme la victoire à son compatriote Olivier Panis.

Sa 2ème année chez Benetton sera moins bonne, marquée par de nombreuses tensions avec son patron d’écurie Flavio Briatore. Alesi signe 5 podiums, ainsi qu’une pôle à Monza (où il est follement acclamé). Mais encore une fois, Alesi doit laisser filer la victoire et se contenter d’une 2ème place. Au terme de la saison, Alesi est 4ème avec 36 points, tandis que Berger est 5ème avec 27 points mais en ayant remporté le GP d’Allemagne. A la surprise générale, Jean Alesi annonce son arrivée chez Sauber-Petronas en vue de l’année 1998.

Après avoir, pendant de nombreuses saisons, navigué en haut de tableau, Alesi doit faire connaissance avec le ventre mou du peloton. La Sauber n’est pas une mauvaise voiture, et Jean s’illustre à de nombreuses reprises au cours de l’année. Mais sa fiabilité désastreuse l’empêche de concrétiser ses bons débuts de course. Alesi inscrit 9 petits points, avec en point d’orgue la 3ème place du terrifiant GP de Belgique.

1999 ? La même que 1998, mais en pire ! Jean Alesi ne pourra inscrire que 2 petits points, la faute encore une fois à la fragilité de sa monture. Lassé de ces casses à répétition, Alesi annonce à la fin de l’été son départ de chez Sauber, pour rejoindre son grand ami Alain Prost (il est le parrain d’un des enfants de Jean Alesi) dans son équipe.

Jean Alesi, Alain Prost, Peugeot. Sur le papier, cette association a de la « gueule ». A l’aube du 3ème millénaire les Bleus nourrissent de grandes ambitions, qui sont bien vite détruites. La saison 2000 tourne à l’humiliation pour l’équipe Prost qui n’inscrit aucun point et termine dernière au classement. Performances déplorables, fiabilité à revoir, jamais Alesi n’a pu se mêler à la lutte pour les points (à l’exception de Monaco où il était 7ème avant d’abandonner). L’humiliation est trop grande pour Peugeot qui met fin à son aventure en F1, Alain Prost remplace les blocs Sochaliens par des moteurs Ferrari ancienne génération rebadgés Acer.

Paradoxalement, l’année 2001 est bien meilleure que l’année 2000 pour Prost et Alesi, elle marquera pourtant la fin, brutale, de leur collaboration. Si en début d’année la monoplace n’est pas la plus rapide, elle fait preuve en revanche d’une remarquable fiabilité. Fiabilité récompensée à Monaco où Alesi termine 6ème, marquant son premier point depuis 1 an et demi ! Et rebelote deux semaines plus tard où Alesi, survolté, prend la 5ème place du GP du Canada à Montréal ! Après une ultime 6ème place à Hockenheim, Alesi quitte le navire Prost GP. Le feu couvait depuis plusieurs semaines, les tensions devenaient trop fortes entre les deux hommes. Alesi trouva refuge chez son ancien employeur en F3000, Jordan. 6ème à Spa, Jean Alesi annonce ensuite la fin de sa carrière en F1, une carrière qui prendra fin à Suzuka sur une violente sortie de piste. Coïncidence troublante, les carrières d’Alesi et Prost GP auront pris fin au même moment …

Alesi se tourne alors vers le championnat d’Allemagne de Supertourisme, le prestigieux DTM. En 4 saisons, Jean cumule 4 victoires chez Mercedes mais ne parvient pas à s’imposer comme un candidat en titre. Fin 2005 il annonce sa retraite sportive, malgré une dernière incartade dans le championnat Speedcar Series, auquel il a ardemment contribué. Ce championnat de stock-cars à l’européenne regroupe d’anciennes gloires de la F1, et Jean y remportera 2 victoires. Il est aujourd’hui le capitaine de l’équipe de France FFSA.

La carrière de Jean Alesi fut marquée pendant bien longtemps du sceau de la malchance. La malchance chez Ferrari surtout, mais aussi un choix de carrière malheureux qui l’a vu rejoindre la Scuderia au plus mauvais moment alors que l’équipe Williams en pleine ascension l’avait initialement engagé. Néanmoins, malgré un palmarès peu étoffé, Alesi a su trouver dans le cœur des aficionados de F1 une place de choix, et notamment chez les Tifosis. Certes Lauda et Schumacher étaient acclamés par les supporters de Ferrari pour leurs nombreuses victoires. Mais ils sont deux et seulement deux à être aussi follement acclamés, malgré un palmarès limité : Gilles Villeneuve, et Jean Alesi qui a repris le numéro 27 du petit québécois chez Ferrari. Alesi, c’est un peu notre Gilles Villeneuve français. Un pilote généreux, fougueux, spectaculaire et enthousiasment. Le dernier des mohicans en quelque sorte, le dernier de cette lignée de pilotes qui n’avaient pas froid aux yeux, qui ne se posaient pas de questions. Alors bien entendu, il y’avait quelques accidents et sorties. Mais bien loin de cette image de pilote dangereux et irréfléchi que l’on a voulu créer en France. Comme quoi notre beau pays ne sait pas toujours reconnaître à leur juste valeur nos champions …

lundi 24 août 2009

L'histoire de la formule 1 : 2ème épisode, Didier Pironi

Hier, Dimanche 23 août nous célébrions le 22ème anniversaire de la mort de Didier Pironi. Je tenais ici à lui rendre hommage en lui consacrant un petit article.



Didier est né le 26 mars 1952 à Villecresnes en région Parisienne. Issu d’une famille plutôt aisée d’immigrants italiens, Didier est plongé dans le bain de la compétition automobile par son cousin et demi-frère José Dolhem, qui commençait à la fin des années 1960 à acquérir une certaine notoriété. C’est l’époque pour Didier des chevauchées à moto dans Paris en compagnie de Jean-Pierre Jarier (dont il sera l’équipier chez Tyrrell en 1979). Contre l’avis de ses parents, qui le voyaient plutôt reprendre la tête des affaires familiales, Didier s’inscrit à l’école de pilotage Winfield sur le circuit Paul Ricard, au Castellet.

En 1972, à tout juste 20 ans, il remporte le volant Elf, et la saison de formule Renault pour 1973 offerte au vainqueur. Lors de cette 1ère année il termine 6ème du championnat, avec deux 2èmes places pour meilleurs résultats. Après cette année d’apprentissage, Pironi remporte le titre national en 1974 après 7 succès. Fort logiquement il passe l’année suivante à l’échelon européen et termine à la 3ème placé du championnat, remporté par son équipier René Arnoux. Pironi remporte néanmoins 3 victoires, dont le prestigieux grand prix de Monaco, en lever de rideau du grand prix de formule 1. 1976 verra Pironi remporter le championnat européen de formule Renault avec un total impressionnant de 12 victoires en 17 courses. Fort de ce triomphe Pironi est engagé dans la prestigieuse écurie Martini de formule 2, où il retrouvera comme équipier René Arnoux. Il terminera 3ème de ce championnat (gagné par Arnoux) en remportant la manche d’Estoril devant des pilotes aux noms bientôt prestigieux : Bruno Giacomelli, Eddie Cheever ou Keke Rosberg. Parallèlement Didier dispute en mai 1977 le prestigieux grand prix de Monaco de formule 3, où les patrons des écuries de F1 viennent repérer les futurs talents. Qualifié en 2ème position derrière Piercarlo Ghinzani, Pironi remporte ce meeting, devançant de 10 secondes un certain Elio de Angelis.

Dès lors, voir Ken Tyrrell s’intéresser à Pironi fin 1977 n’a rien d’étonnant. Le parisien, sponsorisé par Elf (qui est également sponsor de Tyrrell) obtient le 2ème volant de l’écurie anglaise pour 1978, aux côtés de Patrick Depailler. Sa 1ère saison dans le grand bain de la formule 1 est plutôt honorable. Certes Didier est distancé par son expérimenté équipier Patrick Depailler, mais Pironi parvient à inscrire plusieurs fois des points, avec en points d’orgues deux 5ème place à Monaco et Hockenheim. Il termine le championnat 1978 15ème, avec 7 points.
Dans le courant de l’année, Pironi s’est engagé aux 24 heures du Mans aux côtés de Jean-Pierre Jaussaud sur l’une des Alpine-Renault. Les deux hommes vont finalement s’imposer après l’abandon de leurs équipiers Jean-Pierre Jabouille et Patrick Depailler. Ce succès, le premier d’une Alpine-Renault à moteur turbo est tout simplement historique pour le sport auto français, et contribue à renforcer la notoriété de Pironi.

A ce moment, il lorgne du côté de l’équipe Renault F1, qui a décidé d’engager une 2ème voiture à moteur turbo en formule 1. Mais Pironi est retenu par Ken Tyrrell, et c’est finalement son ancien équipier René Arnoux qui entre à la Régie Renault. Contraint de rester une année supplémentaire chez Tyrrell, une équipe où il ne se plaît pas vraiment, Pironi va réaliser une très belle saison, qui le voit monter sur ses premiers podiums à Zolder (GP de Belgique) et à Watkins Glen (GP des Etats-Unis Est). Ajoutez à cela 6 autres points, et Didier termine l’année 1979 à la 10ème place au classement général, à égalité avec son équipier et ancien camarade Jean-Pierre Jarier.

Le natif de Villecresnes veut cependant passer un cap. Et pour cela, il part chez Ligier qui a longtemps bataillé pour le titre mondial en 1979. Aux côtés de Jacques Laffite, Didier Pironi va effectuer une année formidable qui le verra terminer à la 5ème place finale avec 34 points, 2 unités seulement derrière son équipier Laffite. Le jour de gloire de Didier, c’est bien entendu ce 4 mai 1980 lorsqu’il emporte sa 1ère victoire en carrière sur le circuit de Zolder en Belgique. 2 semaines plus tard il signe sa 1ère pôle position, à Monaco. Il résiste aux Williams pendant les deux-tiers de l’épreuve avant de sortir de la route, piégé par la pluie. Malgré une autre pôle signée au GP de France, Didier décide de quitter les Bleus pour rejoindre la Scuderia Ferrari en 1981. Pironi a en effet peu apprécié les coups de sang de son patron Guy Ligier, notamment au soir de ce fameux GP de Grande-Bretagne, qui a vu Pironi sortir de la route alors qu’il occupait la 5ème place, à la suite du bris d’une jante. S’en est suivie une dispute monumentale entre Pironi et son patron, qui acheva de convaincre le pilote parisien de quitter l’équipe Vichyssoise.
Il retrouve chez Ferrari son grand ami Gilles Villeneuve, qui sort d’une année calamiteuse avec la Scuderia. Sur la toute nouvelle monoplace à moteur turbo, Pironi va vivre une saison délicate, tronquée par le manque de fiabilité de sa machine. Il ne pourra faire mieux qu’une 4ème place à Monaco, acquise après être parti depuis la 18ème place. Il termine l’année 13ème avec 9 points, alors que Villeneuve est 7ème avec 25 points et 2 victoires.

L’année 1982 débute aussi mal pour Pironi, avec un seul point marqué en 3 courses. Seule consolation, son équipier et ami Villeneuve n’a toujours pas ouvert son compteur puisque sa 2ème place acquise à Long Beach lui a été retirée en raison de la non-conformité de son aileron arrière.
Pironi se fait remarquer en ce début d'année plutôt pour son rôle de président du GPDA (Grand Prix Drivers Association), puisque c’est lui qui mène (avec Niki Lauda) la grève des pilotes au GP d’Afrique du Sud, pour protester contre le nouveau statut de la licence professionnelle des pilotes de grand prix. Il s’agit d’un des faits d’armes majeurs de la carrière de Pironi, qui lui valut un profond respect de la part de ses adversaires et confrères.

Retour au sport : les Ferrari redorent leur blason à Imola, ou les écuries anglaises ont décidé de boycotter la course. Après l’abandon de leurs seules rivales, les Renault de Prost et Arnoux, les Ferrari de Villeneuve et Pironi continuent leur lutte fratricide, au cours de laquelle ils échangent 7 fois leurs positions ! Dans les dernières boucles, le stand Ferrari, en liaison téléphonique avec le Commendatore Enzo Ferrari, décide de geler les positions : 1 Villeneuve, 2 Pironi.
Mais Pironi transgresse cette consigne en attaquant Villeneuve dans le dernier tour, et en lui ravissant la victoire. C’est le clash entre les deux amis, Villeneuve jurant de ne plus jamais adresser la parole à celui qui l’a trahit.

Malheureusement, cette querelle tourne au drame deux semaines plus tard. Le 8 mai 1982 lors de la dernière séance de qualifications du GP de Belgique, alors qu’il rentre au stand après avoir échoué dans sa tentative de ravir le meilleur temps à Pironi, Gilles Villeneuve s’accroche avec la March de Jochen Mass. La Ferrari s’envole sur la roue arrière gauche de la March, effectue plusieurs tonneaux et éjectant son pilote. L’état de santé de Villeneuve est désespéré, il meurt dans la soirée après avoir été rejoint par sa famille. Didier Pironi est anéanti par ce drame. Mais lui, le beau garçon au visage poupin n’aime pas laisser transparaître ses émotions. Pas de larmes, d’hommages vibrants, juste une profonde tristesse, qu’il garde en son for intérieur. Il n’aimait pas cette situation de guerre, qui avait éclaté à la suite d’un stupide malentendu. Et puis maintenant, il y a les accusations. Certains tifosis vont en effet accuser Pironi d’avoir provoqué _ indirectement _ la mort de Villeneuve en l’ayant trahi à Imola, et en ayant du même coup aiguisé son esprit de revanche. Accusation proprement stupide et imbécile qui toucha beaucoup Pironi.

Forfait à Zolder, Didier reprend le volant de sa Ferrari à Monaco 15 jours plus tard. 5ème sur la grille il occupe la 3ème place au 74ème des 76 tours de course, au moment où une fine pluie s’abat sur Monaco. Le leader, Alain Prost se fait piéger et tape le rail à la chicane laissant Patrese en tête. Patrese qui dans le dernier tour part en tête-à-queue, avant de repartir. Mais pendant ce temps, Pironi et De Cesaris sont passés … Mais pas pour longtemps ! Pironi stoppe sa Ferrari en panne électrique et De Cesaris son Alfa Romeo en panne d’essence ! Patrese récupère finalement son bien en franchissant en vainqueur la ligne d’arrivée. Malgré son abandon, Pironi se classe 2ème et prends alors la 3ème place au classement avec 16 points. De nouveau sur le podium à Detroit (3ème derrière la McLaren de Watson et la Talbot-Ligier de Cheever), Pironi arrive à Montréal au 2ème rang du classement.

Mais cette course tourne de nouveau au drame pour Pironi, le 2ème cette saison. Placé en pôle, Pironi cale le moteur de sa Ferrari au départ. Agitant les bras pour prévenir ses adversaires, il est évité par tous les pilotes sauf le malheureux Riccardo Paletti qui emboutit son Osella à près de 180 km/h dans l’arrière de la Ferrari. Le jeune Italien décède instantanément. Découragé et profondément choqué, Pironi ne termina que 9ème de ce grand prix. Il se reprends courageusement à Zandvoort pour le GP des Pays-Bas qu’il remporta magistralement, s’emparant du même coup de la tête du classement. Une 2ème place au GP de Grande-Bretagne et une 3ème place au GP de France le placent avec 9 points d’avance sur son plus proche poursuivant au classement, John Watson. La France semble alors bien partie pour obtenir son premier titre de champion du monde des pilotes.

Mais à Hockenheim survient le 3ème drame de cette saison 1982. Samedi 7 août, dernière séance d’essais libres du GP d’Allemagne. Il pleut à verse, la piste est détrempée, la visibilité nulle. En piste, Didier Pironi est dans un tour rapide, il vient de dépasser la Williams de Derek Daly, juste avant d’entrer dans le Stadium. Mais Pironi n’a pas vu dans ce brouillard d’eau la Renault de Prost, qui effectue un tour à vitesse modérée. La Ferrari s’envole sur la roue arrière-droite de la Renault, s’élève à 5 mètres de hauteur, et ne reprend contact avec le sol que 250 mètres plus loin, très brutalement. Un accident plus que ressemblant à celui qui a coûté la vie à Villeneuve 3 mois plus tôt. Pironi est vivant, conscient même. Nelson Piquet s’arrête immédiatement pour venir secourir le pilote français qui a les jambes atrocement broyées. Quelques secondes plus tard, les secours arrivent ainsi que le médecin chef de la formule 1, Syd Watkins. Il envisage plus que sérieusement une amputation, et il faudra toute la persuasion de Didier Pironi pour l’en dissuader. Il est héliporté vers l’hôpital d’Heidelberg. Le lendemain, son équipier Patrick Tambay qui a remplacé Gilles Villeneuve, remporte une émouvante victoire, offrant un peu de baume au cœur à la Scuderia Ferrari. Une fois l’état de santé de Pironi stabilisé, il est transféré à Paris dans le service du Dr Letournel, qui a déjà soigné de nombreux pilotes de formule 1 blessés.

Didier Pironi ne remportera pas le titre de champion du monde 1982. Il terminera finalement 2ème avec 39 points (en ayant disputé 11 courses sur 16), seulement dépassé par Keke Rosberg, avec 44 points. Pour beaucoup, Pironi est perdu pour la course. Mais c’est bien mal connaître l’intéressé, qui n’a eu de cesse de répéter qu’il voulait absolument retrouver la formule 1, pour y gagner de nouveau… Après une quarantaine d’interventions chirurgicales et plus de 3 ans d’une rééducation harassante, il reprend le volant d’une formule 1 le 12 août 1986 (presque 4 ans jour pour jour après son accident) sur le circuit du Paul Ricard, au volant d’une AGS. Après ce test « pour le fun », Pironi s’offre 60 tours au volant d’une Ligier-Renault sur le circuit de Dijon-Prenois, réalisant des chronos moins rapides d’une seconde seulement à ceux du pilote titulaire, René Arnoux. McLaren, Brabham et Ferrari ont fait des propositions à Pironi pour développer les futures F1 à moteurs atmosphériques. Guy Ligier pense même à recruter son ancien pilote en remplacement de Jacques Laffite, lui aussi blessé grièvement aux jambes. Mais Pironi veut revenir en F1 pour gagner, et pas pour y faire de la figuration ou des essais. Il décline donc ces offres, et se consacre en attendant à sa nouvelle passion, l’off-shore.

Ces formules 1 de la mer, Pironi les découvre en 1985 à l’instigation de Philippe Streiff. Conquis, Pironi crée en 1986 sa propre écurie d’off-shores, l’équipe Euronautique-Leader. Engagé dans le championnat d’Europe de la spécialité il pilote lui-même un de ses bateaux en championnat d’Europe. Durant cette saison d’apprentissage, Pironi connaît un sérieux accident, au cours duquel il se fracture 4 vertèbres.

Pour 1987, Pironi engage dans le championnat d’Europe le premier bateau construit par son équipe, baptisé le Colibri. Conçu avec des standards dignes de la formule 1, ce bateau mène à la victoire Didier Pironi et ses équipiers Jean-Claude Guénard (ancien membre de l’écurie Ligier) et Bernard Giroux (journaliste spécialisé dans la formule 1) dans le GP de Norvège d’Arendal. Grands favoris au championnat, Pironi, Guénard et Giroux abordent en pleine confiance l’épreuve de Poole, en Angleterre, une semaine plus tard.

Alors qu’il occupe la 2ème place, le Colibri aborde trop vite une vague laissée par le sillage d’un pétrolier. A 160 km/h, le bateau s’envole et se retourne. A cette vitesse, l’eau est semblable à du béton : Didier Pironi, Jean-Claude Guénard et Bernard Giroux sont tués sur le coup.

L’épilogue de la vie de Didier Pironi ressemble à une mauvaise histoire. Fauché alors qu’il retrouvait la gloire, c’est trop injuste. Par son physique et son caractère il rappelait François Cevert. Ils étaient beaux garçons, issus de bonnes familles, pilotes hors pairs, ils avaient fréquenté des stars du cinéma (on prêtait à Cevert une liaison avec Brigitte Bardot, et Didier Pironi vécut une idylle au début des années 1980 avec Véronique Jeannot), et ils furent tous les deux fauchés en pleine gloire, trop tôt, trop vite. Didier Pironi laissait une femme, Catherine, alors enceinte de jumeaux qu’elle appela … Didier et Gilles.

vendredi 21 août 2009

L'histoire de la formule 1 : 1er épisode, Luca Badoer

Régulièrement, je vous raconterais l’histoire de ceux qui font, ou ont fait la formule 1.

Aujourd’hui, et pour coller au plus près de l'actualité des grands prix, gros plan sur Luca Badoer.

Copyright Ferrari

Curieuse carrière que celle de ce brillant pilote Italien né le 25 janvier 1971 en Vénétie. En 1985 il débute par le Karting et remporte immédiatement 2 victoires. L’année suivante il devient champion régional, et même champion national en 1987. Incontestablement ce jeune homme a un beau coup de volant, puisqu’il réédite cette performance l’année suivante. En 1989 logiquement Badoer s’oriente vers la monoplace, dans le championnat d’Italie de F3. Après une année de rodage Luca empoche sa 1ère victoire en 1990 et termine 10ème du championnat. Sa progression continue en 1991 puisqu’il remporte 3 nouvelles victoires et termine 4ème au classement général.

Puisque, et c’est bien connu, l’appétit vient en mangeant, Luca Badoer franchit une marche supplémentaire en 1992 en s’engageant dans le championnat intercontinental de formule 3000, l’antichambre de la formule 1. Et pour sa 1ère expérience dans la discipline, il réussit l’exploit de remporter le titre, en empochant la bagatelle de 4 victoires en 10 courses ! Il devance au championnat de futurs grands noms de la F1 tels que Rubens Barrichello, David Coulthard ou Olivier Panis.

La F1 justement, c’est l’ambition toute naturelle que nourrit un Badoer tout auréolé de son titre en F3000. Pourtant, une seule porte lui est ouverte, celle de la modeste écurie BMS Scuderia Italia. Qu’à cela ne tienne, Luca tente sa chance et entre dans cette écurie quasiment à 100% Italienne. Il aura pour coéquipier l’expérimenté Michele Alboreto, un bel étalon somme toute.

Malheureusement, après les lauriers et les espoirs nés en 1992, Badoer va faire connaissance avec les désillusions et les railleries en 1993. Au volant de sa Lola pourtant motorisée par un V12 Ferrari, Badoer va traîner sa misère tout au long de l’année. Toujours qualifié en fond de grille (il ne fera jamais mieux que le 21ème chrono), il connaît même l’affront de deux non-qualifications à Donington pour le GP d’Europe et à Monaco. Lorsqu’il connaît la chance de terminer des courses, c’est systématiquement à 2, 3 voir 4 tours du vainqueur. La saison est à ce point catastrophique chez BMS Lola-Ferrari que l’écurie ferme ses portes à 2 courses de la fin du championnat. Les seuls points positifs de cette saison : une miraculeuse 7ème place acquise au GP de Saint-Marin à Imola, et la satisfaction de devancer 1 fois sur 2 son équipier Alboreto en qualifications.

Voilà donc Badoer sur la touche, fin 1993. Il est cependant en lice pour le 2ème volant Benetton (aux côtés du premier pilote un certain Michael Schumacher) face au finlandais JJ Lehto. Mais lors d’essais privés, Badoer détruit sa Benetton dans une sortie de route, et c’est finalement Lehto qui est choisi pour piloter cette monoplace en 1994. Luca doit se contenter d’un poste de pilote essayeur pour la petite Scuderia Minardi, qui a repris une partie des actifs de la BMS Scuderia Italia. Mais compte tenu des faibles moyens de la structure Italienne, Badoer n’effectuera que très peu d’essais en cette année 1994.

A la fin de cette année, Luca Badoer est promu pilote titulaire chez Minardi, afin de remplacer Michele Alboreto parti à la retraite. Mais au cours de la saison 1995, Badoer ne pourra une nouvelle fois pas montrer toute l’étendue de son talent, la faute à une monoplace sous-motorisée par un V8 Ford Zetec à bout de souffle et à des moyens dérisoires. Il réussit tout juste à décrocher deux 8ème places au Canada et en Hongrie. De plus, s’il parvient à faire jeu égal avec son premier équipier, le vieux routier Pierluigi Martini, il se fait dominer assez largement par le Portugais Pedro Lamy en fin de saison, à tel point que c’est le Lusitanien qui marque le seul et unique point de l’équipe Minardi pour 1995 en terminant 6ème du GP d’Australie.

Les galères ne sont pas pour autant finies pour Badoer, puisqu’il signe chez Forti début 1996. Car si les Minardi n’étaient déjà pas des foudres de guerre, que dire des Forti ? Lors du 1er grand prix de l’année à Melbourne en Australie, les deux monoplaces de Guido Forti sont non-qualifiées. Badoer est à 6’’8 secondes du meilleur temps, son équipier Andrea Montermini à 9’’7 secondes ! Le seul combat que pourra mener Badoer cette année, c’est celui contre le redoutable mur des 107%, synonyme de non-qualification. Dès lors, voir Luca se qualifier en 6 occasions sur 10 tentatives fera figure d’exploit (à titre de comparaison son équipier Montermini ne se qualifiera qu’à 5 reprises et ne finira qu’un seul grand prix, contre 2 à Badoer). La faiblesse des moyens de l’écurie Forti s’avère irrémédiable en milieu de saison, à tel point que la structure est dissoute à la veille du GP d’Allemagne, à l’instar de l’aventure Lola-Ferrari en 1993.

Voilà donc Luca Badoer une nouvelle fois à pied, à l’orée de l’année 1997. Une année qu’il consacrera (sans grand succès d’ailleurs) au championnat FIA GT. En 1998 il devient officiellement pilote d’essai de la Scuderia Ferrari. En plus d’effectuer des milliers kilomètres en essais privés, Badoer doit pallier, théoriquement, une éventuelle défaillance de l’un des deux pilotes titulaires…

Il occupe toujours ce poste en 1999, alors qu’en parallèle la Scuderia Minardi fait de nouveau appel à lui pour piloter en grand prix. Il aura à ses côtés le jeune espagnol Marc Gené. Malgré un début de saison tronqué par une blessure survenue aux essais du GP du Brésil (au cours duquel il est remplacé par le français Stéphane Sarrazin), Luca Badoer effectue une saison honnête, au cours de laquelle il parvient à devancer à plusieurs reprises son équipier espagnol. Mais cette saison aurait dû être celle de la consécration pour Badoer, celle de la concrétisation d’un rêve tant espéré. Tout commence au GP de Grande-Bretagne à Silverstone, le 11 juillet. Peu après le départ Michael Schumacher et Eddie Irvine se battent pour la 3ème place au volant des deux Ferrari, alors que le drapeau rouge est agité. Pour éviter l’accrochage Schumacher freine violemment, sort de la route et s’encastre dans le mur de pneus à plus de 150 km/h. Le diagnostic est sans appel : le double champion du monde a les deux jambes brisées. Jean Todt, le patron de la Scuderia doit alors trouver un remplaçant au champion allemand pour la suite du championnat. Tout le monde imagine que Luca Badoer sera choisi, et ce choix serait logique puisqu’il est le pilote de réserve de la Scuderia. Or, contre toute attente, Jean Todt choisi le finlandais Mika Salo (qui a déjà effectué un intérim cette saison chez Bar-Supertec en remplacement de Ricardo Zonta, bléssé à Interlagos) pour remplacer Schumacher ! Enorme déception pour Badoer, qui encaisse sans trop broncher cette décision pourtant contestable. Et comme une cruelle ironie du sort, le destin va le frapper douloureusement une seconde fois quelques semaines plus tard.

26 septembre 1999, GP d’Europe, sur le Nürburgring. La météo est capricieuse, la course totalement folle. Tous les favoris sont au tapis, et grâce à une stratégie judicieuse de son équipe, Badoer se retrouve propulsé en 4ème position, à moins de 20 tours de l’arrivée (il était parti 19ème !). L’exploit est à sa portée, et récompenserait fort justement sa carrière. Las ! Au 53ème tour, sur les 67 que compte la course, sa Minardi-Ford émet une fumée blanche synonyme d’abandon. Arbre de transmission cassé, Badoer range sa monoplace sur le bas-côté et en sortant de son cockpit, ne peut retenir ses larmes. L’image de Luca Badoer en sanglots, pleurant de rage sur le bord de la piste est certainement l’une des plus poignantes jamais vues en grand prix. Fort heureusement pour la petite écurie Minardi, son équipier Marc Gené parviendra à ramener le point salvateur de la 6ème place.

En à peine quelques semaines, Luca Badoer vient de voir passer devant lui les 2, et jusque là uniques chances de sa vie. Au début de l’année 2000, Minardi décide d’engager le jeune Argentin Gaston Mazzacane pour seconder Marc Gené. Luca Badoer est contraint de retourner à son poste de pilote d’essais chez Ferrari. Et durant toute cette décennie, le pilote Italien se contentera d’un rôle, certes primordial, mais non-reconnu par le grand public, loin des feux de la rampe et de la célébrité. En 2005 il est rejoint à ce poste par son ancien équipier chez Minardi Marc Gené. Début 2009, les deux hommes de l’ombre de Ferrari subissent de plein fouet l’interdiction des essais privés en cours d’année. Ils sont contraints au chômage technique 9 mois sur 12. Alors que Gené s’engage en parallèle dans la grande aventure Peugeot aux 24 heures du Mans, Badoer reste quant à lui à court de compétition, résigné en pensant que plus jamais il ne pourrait connaître l’ivresse des grands prix.

Et pourtant, une fois n’est pas coutume dans sa carrière si malchanceuse, le destin va frapper à la porte, mais dans le bon sens cette fois-ci.

25 juillet 2009, qualifications du GP de Hongrie. Au cours la 2ème partie des essais qualificatifs, les caméras s’arrêtent sur la Ferrari de Felipe Massa, encastré dans un mur de pneus du circuit du Hungaroring. Les ralentis sont à la fois formels et terrifiants. Le pilote Brésilien a été heurté de plein fouet par un ressort qui s’est désolidarisé de la Brawn GP-Mercedes de Barrichello. Mis K-O par ce choc effroyable survenu à 250 km/h, Massa n’a pu contrôler sa monoplace qui est sortie de la piste et à échoué violemment dans un mur de pneus. Fort heureusement, la vie du Pauliste n’est pas en danger. Mais ses blessures doivent l’éloigner des grands prix pendant plusieurs semaines.

Comme 10 ans plus tôt, la Scuderia Ferrari doit trouver un remplaçant à son pilote de pointe. Les premiers regards se tournent vers Marc Gené, splendide vainqueur des 24 heures du Mans en juin 2009. Seul problème, il n’a pas conduit en grands prix depuis 2005. Pourquoi pas Sébastien Bourdais, récemment limogé de l’écurie Toro Rosso-Ferrari, et dont le manager, Nicolas Todt est aussi celui de Felipe Massa ? Toutes ces hypothèses sont balayées lorsque Michael Schumacher annonce son retour en formule 1, en remplacement de Felipe Massa. Coup de tonnerre dans le microcosme des grands prix ! Le septuple champion du monde, l’homme de tous les records, qui avait pris sa retraite en 2006 va reprendre du service ! A une seule condition : que sa condition physique, récemment mise à mal par un grave accident survenu lors d’une course motocycliste, le lui permette. Les médias, les fans, les autorités sportives, tous se mirent à rêver d’un combat entre Schumacher et la nouvelle vague emmenée par Lewis Hamilton ou Sebastian Vettel. Las ! Quelques jours plus tard, Michael Schumacher annonce qu’il renonce à son come-back, en raison d’une faiblesse physique.

Et dans la foulée, la Scuderia Ferrari annonce le nom du remplaçant de Felipe Massa : Luca Badoer ! 2ème coup de tonnerre dans le monde des grands prix. Alors que le choix de Marc Gené eut été plus logique (surtout lorsque l’on sait que le GP d’Europe est organisé en Espagne, patrie de Gené), c’est finalement Badoer qui rafle la mise. C’est là tout le paradoxe de la carrière de Luca Badoer : alors que Ferrari ne lui a pas offert sa chance au moment le plus opportun et le plus logique (1999), elle lui offre sa chance sur le tard, au moment où l’on s’y attendait le moins !

En attendant les résultats de ce GP d’Europe, Luca Badoer compte désormais 2 records à son actif : alors qu’il détenait déjà celui du plus grand nombre de grands prix disputés sans avoir marqué de points (49), il détient désormais celui de la plus longue période d’inactivité entre deux participations en grand prix (10 ans), ex-aequo avec le néerlandais Jan Lammers (inactif depuis 1982, jusqu’à son retour en grand prix chez March en 1992).

Ce cadeau _ empoisonné ? _ est une juste récompense pour le fidèle Luca Badoer, en mémoire des services rendus à la Scuderia Ferrari. Et on ne peut lui souhaiter que de profiter au maximum de cette chance. Au nom de tous les passionnés de F1, bonne chance Luca ;)

Une petite présentation


Salut à tous !
Bienvenue sur mon blog, World of Babounet. Comme son nom l'indique, vous trouverez dans ce blog tout ce qui est important à mes yeux .... Inutile de vous dire que j'y parlerais beaucoup de formule 1 !!!
Avant toute chose, une petite présentation s'impose quand même !
Bon je m'appelle Baptiste, mais pour beaucoup je suis "Babounet". Je suis né à Nevers le 12 juillet 1990 (ça ne nous rajeunit pas !) et j'habite désormais (et malheureusement) Béziers dans l'Hérault. Je vais y commencer ma 3ème année d'études en histoire. Pour faire quoi ? Euh ... le rêve ça serait journaliste sportif (sur la formule 1, ça va de soi). Sinon, pourquoi pas prof d'histoire, conservateur de musée ou président de la république.
Mes passions, bien entendu la formule 1 et les sports automobiles en général. Il y'a aussi le foot (supporter du PSG), les sciences politiques, l'histoire et la photo.
Voilà, je crois qu'on a fait le tour. Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un agréable moment sur ce blog ;)