mercredi 27 janvier 2010

L'histoire de la formule 1 : 4ème épisode, Mika Häkkinen (3ème partie)

Bonsoir !
Après de longues semaines d'absence, me revoilà donc enfin avec la suite et la fin de ma petite biographie de Mika Häkkinen, que nous avions laissé à Suzuka à la veille du 16ème et dernier grand prix de la saison 1999.





Il « suffit » donc à Häkkinen de gagner ce grand prix du Japon pour ceindre sa 2ème couronne mondiale consécutive. Quant à Irvine, une 3ème place lui assurerait son 1er titre mondial. Le week-end japonais tourne au cauchemar pour l’Irlandais : 10ème et 12ème des séances d’essais libres, il pulvérise sa Ferrari le samedi matin, et ne peut faire mieux qu’un décevant 5ème chrono aux essais qualificatifs. Les choses se passent mieux pour Häkkinen qui se place en 1ère ligne, juste derrière le poleman, Michael Schumacher. L’allemand a pour objectif de bloquer Häkkinen, et permettre ainsi à Irvine de passer le pilote de la McLaren-Mercedes.

Or dimanche, rien ne se passe comme prévu. Häkkinen effectue un départ magistral, et chipe la 1ère place à Schumacher. Pire pour Ferrari : si Irvine parvient à passer Frentzen et Coulthard, il est lui-même passé par un Olivier Panis des grands jours, parti comme une fusée sur sa Prost-Peugeot depuis la 6ème place. A la fin du 1er tour, l’ordre est le suivant : Häkkinen, M.Schumacher, Panis, Irvine, Coulthard. Bloqué derrière la Prost de Panis, Irvine perd un temps précieux. Au moment de l’arrêt aux stands du Grenoblois, Irvine est 3ème à 30 secondes d’Häkkinen ! Personne ne pourra le rattraper, y compris Schumacher. Et au terme d’une course limpide, Mika Häkkinen franchit la ligne d’arrivée en vainqueur, et en champion du monde pour la 2ème fois consécutive. Un exploit réalisé uniquement à 6 reprises depuis 1950. Et ce n’est pas la perte du titre des constructeurs (au profit de Ferrari) qui gâchera la fête chez McLaren-Mercedes. Le prochain objectif d’Häkkinen, remporter un 3ème titre consécutif, exploit réalisé jusqu’à présent par le seul Juan-Manuel Fangio.

Comme il est de coutume depuis 1996, la saison débute à Melbourne. Ce grand prix d’Australie, le 1er du nouveau millénaire, commence sans surprise avec une 1ère ligne 100% grise : Häkkinen devance Coulthard, mais les McLaren-Mercedes sont moins dominatrices que lors des deux précédentes éditions puisque Michael Schumacher et son nouvel équipier Rubens Barrichello ne sont qu’à 5/10èmes. Lors de la course, les deux pilotes des flèches d’argent sont contraints à l’abandon suite à des problèmes moteurs, alors que Schumacher, vainqueur du grand prix, restait collé à leurs basques. Scénario identique à Interlagos, Schumacher l’emporte et Häkkinen est contraint à l’abandon. Pour le retour de la F1 en Europe, Häkkinen doit impérativement réagir. Mais sur les terres de Ferrari, à Imola, le finlandais volant devra se résigner à la 2ème place, après que Michael Schumacher et Ferrari aient offert une formidable leçon de stratégie à leurs adversaires. Avec 24 points de retard sur l’Allemand, Häkkinen est mal parti au championnat. D’autant plus qu’un autre adversaire pointe le bout de son capot : David Coulthard, son propre équipier, qui remporte le GP de Grande-Bretagne à Silverstone, devant Häkkinen et Schumacher. A Barcelone Häkkinen prend sa revanche et s’impose devant Coulthard. M.Schumacher termine 5ème mais 15 jours plus tard il s’offre une brillante victoire au GP d’Europe après avoir infligé une nouvelle leçon stratégique à Häkkinen (2ème) et Coulthard (3ème). L’Allemand paraissait même pouvoir décrocher le gros lot à Monaco avant qu’un problème d’échappement ne le contraigne à l’abandon. C’est finalement Coulthard qui gagne le jackpot et la victoire, tandis qu’Häkkinen termine 6ème après une course qui a tourné pour lui au chemin de croix. Chemin de croix qui se poursuit pour l’épreuve suivante au Canada où il ne peut faire mieux que 4ème, alors que devant Michael Schumacher et Rubens Barrichello signent le doublé pour la Scuderia Ferrari.

Les McLaren-Mercedes renouent avec le succès le 2 juillet à Magny-Cours, mais c’est Coulthard qui l’emporte devant Häkkinen. Décidemment, le finlandais n’a plus un mais deux adversaires à battre, et à abattre … C’est chose faite 2 semaines plus tard en Autriche : « The flyiing Finn » l’emporte devant Coulthard tandis que Schumacher a été contraint à l’abandon au 1er virage. Ce scénario catastrophe pour l’allemand se reproduit la semaine suivante chez lui, à Hockenheim. Percuté par Giancarlo Fisichella, sa course s’arrête après 300 mètres. Häkkinen effectue la bonne opération du jour en terminant 2ème derrière Rubens Barrichello qui remporte une émouvante 1ère victoire. Au championnat, Michael Schumacher n’a plus que 2 points d’avance sur les deux flèches d’argent d’Häkkinen et Coulthard.

Le finlandais prend le pouvoir d’autorité à Budapest, où au prix d’un formidable dépassement sur Schumacher au 1er virage, il s’impose au bout des 77 tours de course sous la chaleur Magyare. Mika Häkkinen 74 points, Michael Schumacher 68 points. 15 jours plus tard, ce combat des chefs atteint son paroxysme à Spa-Francorchamps, en plein des Ardennes Belges. Häkkinen part en pôle position sur une piste encore mouillée. Au 13ème tour, alors qu’il compte 4 secondes d’avance sur M.Schumacher, Häkkinen part en tête-à-queue, et se retrouve relégué à 6 secondes de l’allemand. Pire, son retard monte jusqu’à 11 secondes avant l’unique ravitaillement prévu durant ce grand prix. Une fois effectué, la McLaren compte 6 secondes de retard sur la Ferrari.

Petit à petit, dixième par dixième, Mika va remonter sur la Ferrari. Il est dans sa boîte de vitesse au 36ème tour. Il se met à harceler le Baron Rouge, et tente une 1ère attaque dans la montée du Kemmel au 40ème tour, mais l’allemand lui ferme brusquement la porte. Le pourtant flegmatique finlandais ne peut retenir un geste de colère et de frustration. Mais cette défense pour le moins âpre ne refroidit nullement Häkkinen, qui au 41ème tour se place dans l’aspiration de Schumacher à la sortie du raidillon de l’Eau Rouge. Devant lui, Schumi se prépare à doubler un retardataire, Ricardo Zonta sur sa Bar-Honda. L’allemand envisage une manœuvre de défense dangereuse certes, mais d’une rare intelligence. Il se blottit dans l’aileron de la Bar-Honda, et au dernier moment la déboîte. Derrière, Häkkinen devra obligatoirement freiner pour éviter de percuter la Bar du brésilien.
Schumacher met ce plan à exécution, et dépasse la Bar de Zonta au tout dernier moment par la gauche. Juste derrière la Ferrari, Häkkinen ne peut voir Ricardo Zonta, jusqu’à l’instant où Schumacher se décale. Häkkinen va alors, en une fraction de seconde, prendre la folle décision qui va déboucher sur l’un des plus beaux dépassements de l’Histoire : au lieu de freiner pour éviter l’accrochage, Häkkinen choisit de dépasser lui aussi Zonta, mais par l’extrême-droite de la piste, sans jamais lever le pied. Les 3 hommes sont brièvement de front dans la montée du Kemmel, et au freinage des Combes, Häkkinen prend l’avantage sur Schumacher.

Une manœuvre d’une folle audace, l’une des plus belles jamais vues en grand prix qui débouche sur la 18ème victoire en grand prix pour Mika Hakkinen. En descendant de sa McLaren-Mercedes, le finlandais se dirige vers Schumacher. Les deux hommes se parlent, durant quelques secondes. Que se sont-ils dit ? Mystère… Ce qui est sur, c’est que la vengeance d’Häkkinen est terminée. Oui vengeance, souvenez-vous du vase de Soissons ! Nous avions vu dans la 1ère partie l’épisode du grand prix F3 de Macao 1990, et au cours duquel Schumacher avait littéralement jeté hors de la piste Häkkinen. Le finlandais s’était toujours juré de se venger… Ce 27 août 2000, c’est chose faite et de la plus splendide des manières.

Pourtant, après cet exploit, quelque chose semble s’être cassé chez Häkkinen. Comme si après avoir battu d'une si belle manière Schumacher à Spa, le titre mondial n'était plus que secondaire. Malgré ses 6 points d’avance au championnat, à 4 courses de la fin, Mika ne sera que l’ombre de lui-même. 2ème à Monza, il renonce sur casse moteur à Indianapolis et perd son titre à Suzuka au profit de Michael Schumacher en terminant 2ème derrière la Ferrari. Enfin à Sepang, il termine 4ème après une course bien terne.

La saison 2001 confirmera ce constat implacable, à trois exceptions près. Il commence sa saison à Melbourne par une énorme frayeur, sa suspension casse à près de 260km/h et il finit sa course dans le mur de pneus, alors qu’il était 2ème loin derrière Schumacher. 2ème grosse frayeur à Interlagos où il cale le moteur de sa McLaren au départ. Le fait qu’aucun pilote ne vienne heurter la McLaren immobile relève proprement du miracle ! Entre temps, ça n’était pas bien brillant question performance : il avait sauvé la 6ème place à Sepang de justesse, après une âpre bagarre avec la modeste Arrows-Asiatech de Jos Verstappen. 4ème à Imola, Häkkinen est en mesure de pouvoir effacer ce calamiteux début de saison à Barcelone. A l’issue des 2èmes ravitaillements il prend l’avantage sur Schumacher et file vers sa 19ème victoire en carrière. Mais dans le 4ème virage du tout dernier tour de course, patatras ! Son embrayage explose, et le contraint à l’abandon. Chez Häkkinen, pas de larmes, pas de signe d’énervement, juste une immense déception. Quelle classe !
Comme un signe du destin, il enchaîne les deux grands prix suivant (Autriche et Monaco) par deux abandons, avant de renouer avec le podium à Montréal en terminant 3ème.

Décevant 6ème au Nürburgring, il abandonne même dans le tour de chauffe du grand prix de France. Mika Häkkinen rompt ce signe indien deux semaines plus tard, le 15 juillet. Placé en 1ère ligne du GP de Grande-Bretagne, Häkkinen dépasse sans coup férir Schumacher au 4ème tour et s’envole. Il survole ce grand prix, et empoche sa 19ème victoire en carrière, plus de 33 secondes devant Michael Schumacher ! Cette splendide victoire et l’une des rares oasis dans le désert de la saison 2001 pour le finlandais : suivent un abandon à Hockenheim, une anonyme 5ème place à Budapest, une non-moins terne 4ème place à Spa-Francorchamps puis un abandon à Monza où il a annoncé vouloir prendre une année sabbatique. Son dernier coup d’éclat sera une dernière victoire à Indianapolis, la 20ème de sa carrière au cours d’un grand prix où c’est cette fois lui qui a donné une leçon de stratégie aux Ferrari. Sa carrière se termine sur une nouvelle 4ème place à Suzuka à l’issue d’une course sans grand relief.

Mika Häkkinen peut alors se consacrer à sa femme Erja, et son jeune fils Hugo. En 2002 il annonce finalement sa retraite définitive du monde de la formule 1. Il ne reprendra le volant d’une voiture de course qu’en 2005, dans le championnat DTM sur une Mercedes bien entendu. Après 3 saisons, 3 victoires, 3 pôles positions et un dernier galop d’essais sur une McLaren-Mercedes F1, Häkkinen raccroche définitivement son casque fin 2007. Avec sa retraite disparait un des pilotes les plus doués de sa génération, le seul qui pouvait légitimement prétendre affronter, et parfois battre Michael Schumacher. Ce miraculé a réussi un exploit peut-être encore plus grand que celui effectué par Niki Lauda en son temps : revenir à la compétition après avoir frôle la mort, et même devenir meilleur qu'avant l'accident. Une formidable leçon de courage de la part de ce pilote plein de panache et de fair-play.
Tiens au fait, lors de sa dernière course à Suzuka en 2001, il occupait la 3ème place du grand prix, mais à quelques tours de l’arrivée il cède cette place et le podium à son équipier David Coulthard. Pourquoi ? En remerciement, tout simplement ...

dimanche 15 novembre 2009

L'histoire de la formule 1 : 4ème épisode, Mika Häkkinen (2ème partie)

Bonsoir à tous !

Compte tenu de mon manque de temps, j'ai décidé de diviser ce 4ème opus en 3 partie. Voilà ce soir la 2ème ! Nous avions laissé Mika Häkkinen fin 1995, en véritable miraculé. Comment allait-il aborder son retour à la compétition, début 1996?





Pour la 1ère fois de son histoire, Melbourne accueille un grand prix de formule 1, il s’agit en l’occurrence de la 1ère épreuve du championnat 1996 : le GP d’Australie. Un grand prix en forme de test pour Mika Häkkinen, dont on ignore encore s’il retrouvera son meilleur niveau. En fait, cette incertitude s’estompera bien vite : Häkkinen est 5ème des qualifications, et termine le grand prix à la même place. 3 semaines plus tard il est 4ème du GP du Brésil. Après ces résultats impressionnants, le finlandais enchaîne au cœur de l’été avec de nouvelles bonnes performances : il termine 8 des 10 derniers grands prix dans les points, signant notamment 4 podiums à Silverstone, Spa-Francorchamps, Monza (après être remonté depuis la dernière place suite à un arrêt au stand prolongé) et enfin Suzuka, à chaque fois à la 3ème place. A titre de comparaison, son nouvel équipier l’écossais David Coulthard, ne monte que sur 2 podiums, et termine la saison avec 18 points contre 31 à Häkkinen. Malgré cette comparaison peu flatteuse, Coulthard s’entendra immédiatement avec son équipier finlandais : c’est le début d’une collaboration qui durera 6 ans.

Une collaboration encore plus fructueuse pour l’écurie McLaren l’année suivante : en passant des couleurs rouges et blanches de Marlboro, à celle argentée du cigaretter West, les monoplaces mues par les blocs Mercedes ont ainsi retrouvé leur surnom originel de « flèches d’argent ». Au volant de l’une d’elle, Häkkinen va y réaliser sa meilleure saison, bien que dominé par son équipier David Coulthard. L’écossais remporte en effet deux grands prix (à Melbourne en début d’année puis à Monza), et inscrit 36 points. De son côté, Mika marque 27 points : après un bon début de saison (10 points en 4 courses), le « Flying Finn » connaît un très long passage à vide jusqu’au GP de Grande-Bretagne à Silverstone, au cours duquel il doit renoncer en fin de course, moteur cassé alors qu’il occupait la tête du grand prix. Deux semaines plus tard il est 3ème du GP d’Allemagne, renouant avec le podium. Il termine de nouveau 3ème à Spa-Francorchamps mais est disqualifié (essence non-conforme), puis 4ème en fin d’année à Suzuka. Entre temps lors du GP du Luxembourg, le finlandais a connu une énorme désillusion en abandonnant au 43ème des 67 tours de course sur casse moteur, après avoir signé la 1ère pôle position de sa carrière et mené l’intégralité de l’épreuve.
Et puis le 26 octobre 1997, lors du GP d’Europe, en bénéficiant de l’abandon de Michael Schumacher à la suite d’un accrochage avec Jacques Villeneuve que l’allemand avait lui-même provoqué, ainsi que d’une consigne d’écurie demandant à son équipier Coulthard de le laisser passer, Mika remporte dans les derniers mètres de cette course, sa 1ère victoire en formule 1, après 95 grands prix. Il ne le sait pas encore, mais Häkkinen vient de franchir un cap décisif.
Profitant du retrait du motoriste Renault, l’écurie McLaren-Mercedes va très vite s’imposer, début 1998, comme l’écurie à battre (et à abattre). La McLaren-Mercedes MP4/13 conçue par Adrian Newey est un petit bijou de technologie, malgré les controverses l’entourant, notamment sur la légalité de son système de freinage. En atomisant les chronos durant l’intersaison, Häkkinen et Coulthard se placent en grands favoris. Un statut confirmé à Melbourne pour le 1er grand prix : les flèches d’argent trustent la 1ère ligne, Häkkinen devant Coulthard. L’ordre restera le même durant la course, jusqu’au 36ème tour : Häkkinen rentre à son stand … mais en ressort immédiatement : un malentendu à la radio l’a poussé à rentrer alors que rien ni personne ne l’y attendait ! Coulthard prends donc la tête, mais au 56ème des 58 tours de course, l’écossais laisse passer Mika Häkkinen, qui reprend la tête : un gentleman-agreement passé entre les deux hommes stipulait que l’homme qui occuperait la tête du peloton au 1er virage ne serait plus inquiété pour la victoire. Au 1er virage, c’était bien Häkkinen qui menait devant Coulthard. L’écossais a respecté scrupuleusement les termes de ce contrat moral, et a laissé la victoire à Häkkinen qui montera sur le podium de Melbourne en larmes. Mika réédite sa victoire à Interlagos, devant Coulthard et la Ferrari de Schumacher reléguée à plus d’une minute, preuve de la supériorité des flèches d’argent en ce début de saison. Pourtant à Buenos Aires, Häkkinen ne peut faire mieux que 2ème derrière Schumacher. Mais le défaut de cette voiture, c’est bien la fiabilité : à Imola, Mika connaît son 1er abandon de la saison, boîte de vitesses cassée, il doit laisser les lauriers à son équipier Coulthard qui revient à 3 points au championnat du monde. Le Finlandais volant réagit superbement en emportant deux magnifiques victoires à Barcelone et Monaco.
Il connaît ensuite un long passage à vide : abandon dès le départ à Montréal, sur un autre problème de boîte de vitesses, 3ème du GP de France derrière les deux Ferrari de Schumacher et Irvine, 2ème du GP de Grande-Bretagne une nouvelle fois derrière Schumacher. Il reste 7 courses, et Häkkinen ne compte que 2 points d’avance sur Schumacher. Coup sur coup le finlandais remporte les GP’s d’Autriche et d’Allemagne, augmentant son avance à 16 points. Puis à Budapest il ne peut faire mieux que 6ème, en ayant parcouru les derniers tours au ralenti suite à des problèmes de boîte de vitesses (encore !). La victoire de Schumacher relance le championnat : à Spa les deux hommes renoncent suite à deux accrochages distincts. A Monza, pendant que Schumacher comble les Tifosis avec une victoire, Häkkinen termine péniblement à la 4ème place, après des problèmes de freins. Il reste 2 courses, et les deux rivaux comptent chacun 80 points.
Au Nürburgring pour le GP du Luxembourg, Häkkinen s’impose devant Schumacher et prend un avantage de 4 points sur l’allemand. Une victoire à Suzuka lui donnerait le titre mondial. C’est pourtant Schumi qui signe la pôle, mais le pilote Allemand doit s’élancer du fond de grille après avoir provoqué un drapeau rouge en calant ! La voie est donc libre pour Häkkinen, qui empoche le titre mondial dès le 32ème tour : après une folle remontée qui le mène jusqu’à la 3ème place, Schumacher doit abandonner suite à une crevaison. Häkkinen remporte finalement sa 9ème victoire en carrière, et son 1er titre de champion du monde, le premier à échoir à un finlandais depuis le titre de Keke Rosberg en 1982. Il permet également à McLaren-Mercedes de remporter la couronne des constructeurs. Le blond scandinave, à la descente de sa voiture, tombe dans les bras de son équipier David Coulthard avant de courir aux pieds des tribunes de Suzuka pour y saluer ses supporters. Incontestablement, c’est le triomphe d’un mec bien.
Un triomphe que d’aucun annoncent cependant sans lendemain : la McLaren-Mercedes était tellement supérieure à ses rivales, que pour certains c’est elle qui a permis au finlandais de remporter le titre, et non le pilotage d’Häkkinen (pourtant il a signé au cours de l’année 1998 9 pôle positions sur 16 possibles). Il va donner à ses détracteurs une cinglante réponse l’année suivante.

Très peu de choses changent en 1999. Les équipes McLaren et Ferrari gardent leurs duos inchangés, et tout le monde s’attend à voir un nouvel épisode du duel Häkkinen-Schumacher, pourquoi pas troublé par Coulthard et plus sporadiquement par Irvine. L’irlandais, fidèle lieutenant de Schumacher chez Ferrari depuis 1996 va pourtant être, à la surprise générale, la révélation de cette saison. A Melbourne pour le 1er grand prix de l’année, Häkkinen signe la pôle position (avec 1’’3 d’avance sur la première Ferrari celle de Michael Schumacher), mais doit renoncer après 21 tours, sur problèmes d’accélérateur. Schumacher retardé par d’innombrables soucis, Coulthard hors-jeu dès le 13ème tour, c’est finalement Irvine qui s’impose pour la 1ère fois de sa carrière. On ne le sait pas encore, mais le vrai rival d’Häkkinen, c’est lui.
A Interlagos Häkkinen remet les pendules à l’heure et s’impose sans coup férir face à Schumacher et la Jordan-Mugen Honda d’Heinz-Harald Frentzen. 3ème manche de la saison, Imola et le GP de Saint-Marin. Tout commence bien pour Häkkinen qui après 17 tours de course mène avec 12 secondes d’avance sur Coulthard, et 16 sur Schumacher. Pourtant, à la fin du 17ème tour, le finlandais commet une erreur incroyable dans la dernière chicane, part en tête-à-queue et frappe le mur. Une bourde qui coûte cher : la victoire revient à Schumacher devant Coulthard. Ca n’est pas forcément mieux 15 jours plus tard à Monaco, puisque Mika doit se contenter de la 3ème place derrière Schumacher et Irvine, après avoir pourtant signé sa 4ème pôle en 4 courses. Il dégringole à la 3ème place du championnat, à 12 points de Schumacher.
Mika Häkkinen réagit à Barcelone en remportant le GP d’Espagne devant son équipier Coulthard. Schumacher, 3ème, n’est plus qu’à 6 points. Et Mika va prendre la tête du championnat lors de la course suivante à Montréal, en remportant ce GP du Canada tandis que Schumacher s’élimine de l’épreuve après une sortie de route. 2 semaines plus tard il termine 2ème du terrible GP de France, disputé dans des conditions très difficiles : alors que Frentzen l’emporte, Schumacher ne termine que 5ème. L’allemand est relégué à 8 points de son rival finlandais.
Häkkinen qui va se retrouver privé de son principal adversaire le 11 juillet 1999, lors du GP de Grande-Bretagne : Schumacher sort violemment de la piste peu après le départ, alors que le drapeau rouge vient d’être sorti. La Ferrari vient s’écraser à plus de 150 km/h dans le mur de pneus du virage de Stowe. Schumacher est extrait de sa monoplace les deux jambes brisées net. Häkkinen n’en profite pas immédiatement, il doit renoncer au 35ème tour après la perte de sa roue arrière-gauche. La victoire revient à Coulthard devant Irvine, qui signe la bonne opération du week-end : avec 32 points il revient à 8 longueurs d’Häkkinen. Un retard qui se réduit d’abord à 2 points après le GP d’Autriche qu’Irvine gagne devant Coulthard. Häkkinen n’est que 3ème, car le finlandais est remonté du fond du classement après un accrochage au 2ème virage du grand prix… avec son propre équipier ! Mika n’est pourtant pas au bout de ses peines : à Hockenheim la semaine suivante, Häkkinen est victime d’une impressionnante sortie de route suite à la crevaison de son pneu arrière-droit. La victoire, initialement dévolue à Mika Salo (le remplacement de Schumacher) échoue à Eddie Irvine qui bénéficie des consignes d’équipe imposant à Salo de lui laisser la 1ère place. Grâce à ce succès l’Irlandais s’installe aux commandes du championnat avec 8 points d’avance sur Häkkinen.
Le champion en titre met fin à cette série noire en remportant le GP de Hongrie, devant Coulthard et Irvine. Il reprend même la tête du championnat à Spa-Francorchamps en terminant 2ème de l’épreuve derrière Coulthard (non sans avoir évité de justesse un nouvel accrochage au départ avec ce dernier !).Häkkinen parait ensuite pouvoir prendre un avantage décisif sur Irvine lors du GP d’Italie à Monza : après la mi-course il mène largement alors qu’Irvine est englué en 8ème position : ce succès donnerait à Mika 11 points d’avance sur Irvine. Las ! Au 29ème tour, comme à Imola en début de saison, Häkkinen commet une erreur monumentale, et perd le contrôle de sa McLaren-Mercedes dans la 1ère chicane. Il sort de sa voiture fou de rage, et va se réfugier à l’abri des arbres pour y pleurer de longues minutes. La bonne opération est effectuée par Frentzen qui remporte ce GP d’Italie. Irvine, 6ème, revient à égalité de points avec Häkkinen (60 unités). Frentzen est 3ème avec 50 points devant Coulthard 48 points.
La 14ème des 17 épreuves du championnat 1999, le GP d’Europe sera la course la plus folle de la saison. Disputée dans des conditions changeantes et piégeuses, Coulthard et Frentzen, contraints à l’abandon, sont quasiment éliminés de la course au titre. Irvine, victime d’un incroyable cafouillage dans le stand Ferrari lors de son arrêt, termine hors des points en 7ème position. Häkkinen, un moment relégué au 14ème rang à cause d’une stratégie désastreuse, parvient à remonter en 5ème position et à arracher deux points. Pour l’anecdote, après les abandons des leaders successifs (Frentzen puis Coulthard, Ralf Schumacher et Fisichella), c’est Johnny Herbert (Stewart-Ford) qui signe une victoire totalement inattendue devant la Prost-Peugeot de Jarno Trulli, et la 2nde Stewart celle de Barrichello. Häkkinen 62 points, Irvine 60 points.
L’avant-dernière épreuve du championnat 1999 se déroule sur le tout nouveau circuit de Sepang en Malaisie. Michael Schumacher y effectue un retour à la compétition tonitruent en signant la pôle position. Il s’efface très devant son équipier Irvine, l’Allemand se chargeant ensuite de retenir la McLaren-Mercedes d’Häkkinen. Lorsqu’au jeu des ravitaillements l’Allemand reprend la tête de la course devant Irvine, Häkkinen n’est pas en mesure de contester la victoire aux Ferrari. « Schumi » laisse donc logiquement passer Irvine, qui s’en va signer tranquillement sa 4ème victoire de l’année. Mais la joie est de courte durée : les deux voitures rouges sont disqualifiées après le contrôle technique : leurs déflecteurs latéraux ne sont pas aux mesures règlementaires. Häkkinen, 3ème, semble donc devoir être déclaré vainqueur, ce qui lui donnerait du même coup le titre mondial.
Mais afin de préserver le suspens dans la course à la couronne mondiale, la Fédération Internationale de l’Automobile décide d’annuler cette décision, et redonne la victoire à Irvine. A deux semaines du dénouement du championnat la situation est donc la suivante : Irvine 1er 70 points, Häkkinen 2ème 66 points. Qui des deux hommes va remporter le titre 1999 ?

vendredi 2 octobre 2009

Histoires personnelles : ma première fois

Petite séquence perso aujourd’hui, je vais vous raconter un peu ma vie. Bon en l’occurrence, c’est déjà quelque chose qui commence à dater (snif) : ma première fois … aux 24 heures du Mans (les pervers doivent être déçus :p)


Aller aux 24 heures, c’était déjà une idée qui me trottait dans la tête depuis un petit moment. Et puis dans le mois de mai, après une rupture sentimentale j’ai voulu me changer les idées. Quoi de mieux qu’aller à une course de légende pour ça ?

Les choses se sont goupillées assez vite, et facilement. A tel point que je n’ai même pas eu à payer ma place, puisqu’un ami parisien qui avait acheté sa place, et qui finalement n’a pas pu se libérer pour la semaine des 24 heures, me l’a gentiment cédée. Je l’en remercie encore vivement !

Donc ensuite, une fois tous les détails logistiques réglés (achat d’une tente, de vivres, etc.) le grand jour du départ arrive. Ou plutôt le grand soir !

Mercredi 10 juin 2009, départ pour Le Mans. Alors partir en train au Mans de Béziers, c’est toute une aventure ! Il y a l’option Béziers-Le Mans via Paris, très rapide (environ 6 heures) mais extrêmement chère. Pour ma part, j’ai décidé d’emprunter le train de nuit et les TER, option beaucoup plus économique. Mercredi soir donc, départ de Narbonne (et oui, ce train ne passe pas à Béziers !) vers 23h. Après une très courte nuit de sommeil sur une couchette pas très confortable, voilà mon premier arrêt, dans une terre qui ne m’est pas tout à fait inconnue : Vierzon. Alors, pour ceux qui connaissent, déjà que la journée c’est pas bien rempli Vierzon, vous imaginez à 5h30 du matin ! Une demi-heure plus tard, me voilà dans un TER, direction mon 2ème arrêt, Tours. Et à Tours, changement de TER pour la direction du Mans. A 9h, me voilà enfin arrivé !

Les Manceaux ont fait les choses en grand pour ces 24 heures. Dès le pied posé sur le quai, la direction du circuit est indiquée. Pour cela, il faut emprunter un tramway, et après un trajet d’une dizaine de minutes, me voilà arrivé sur ce site historique. Ca fait tout de suite battre le cœur un peu plus vite quand on franchit le portal d’entrée !

Ensuite, encore 25mn de marche pour aller récupérer mon emplacement de camping, et après c’est là que ça se complique. Aller au Mans en train, c’est sur que c’est économique. Mais alors par contre une fois sur place, c’est la merde, vu que le circuit fait 13 km de long. Aller d’un point à un autre du tracé à pied, harnaché comme je l’étais (tente quechua, duvet, sac de voyage et sac à dos) c’est vite crevant ! Résultat, à 12h lorsque j’ai posé ma tente, je me suis rendormi jusqu’à 16h. Ensuite, petit tour obligé dans les paddocks et la ligne des stands, ouverte au public (tiens, la F1 devrait en prendre de la graine). J’ai pu y croiser Jacky Ickx, Franck Lagorce, Olivier Panis, Marc Gené, Hugues de Chaunac … bref que du beau monde ! Le soir venu, les voitures entrent en piste pour la fin des qualifications. Une Peugeot en pôle, ça commence bien ^^

Le lendemain, vendredi pas de courses au programme. Mais une journée pourtant bien remplie ! Elle commence par une visite au musée des 24 heures, rassemblant une grande collection d’anciennes voitures mythiques. Un pur régal ! Ensuite direction le centre-ville du Mans pour une rapide visite de cette fort jolie ville. Après un arrêt à la gare pour prendre mon billet de retour, direction une grande surface pour compléter mon ravitaillement. Et ensuite, direction la parade des pilotes. C’est un moment très spécial dans la semaine des 24 heures : tous les participants défilent dans le centre-ville du Mans, ainsi que des voitures d’exception. C’était un peu le bordel, à cause de la participation de Patrick Dempsey qui a déclenché une vague limite hystérique à son passage !

Une fois la parade terminée, retour au circuit pour une longue nuit de sommeil. Normal, demain c’est le grand jour !

Samedi debout 6h ! Après une douche et un petit déjeuner frugal, encore une heure de marche pour rejoindre les gradins de la ligne droite des stands. J’ai bien fait de me lever si tôt, j’ai la chance de pouvoir m’asseoir à une très bonne place, juste devant le stand Audi. Après les courses annexes de la matinée, vers 13h la tension commence à monter. Les gradins se remplissent, et bientôt il devient impossible de quitter sa place ! Sur l’ensemble du tracé, on estime le nombre de spectateur à environ 250.000 ! Petit à petit les voitures sont amenées sur la grille. Les plus populaires sont évidemment les Peugeot, devant les superbes Lola Aston-Martin et les Audi. 14h, les hymnes nationaux commencent à être joués. Les hymnes Danois, Néerlandais et Allemands sont repris ça et là. Arrive alors le God Save the Queen, repris en chœur par des dizaines de milliers de fans britanniques. En réponse à cette provocation, on se devait de répondre en entonnant à notre tour la Marseillaise. Drapeau français en berne, main sur le cœur, Babounet y participe aussi :p Un sacré moment d’émotion !

Et puis, voilà le départ. Les 55 voitures passent en peloton serré devant nous, au baisser du drapeau national. Quel bonheur ! Très vite les Peugeot prennent les devant, et les ennuis commencent à accabler les Audi.

Le soir venu vers 21h, je décide de m’accorder un peu de repos afin d’être de retour le plus tôt possible le lendemain matin. En retournant à ma tante, je croise un mec qui tient une grande croix catholique, où est inscrite ce message : 12/06/2009 RIP Formula 1. A l'heure où le microcosme de la F1 se plaint de la désaffection du public (qui a tout à fait raison d'ailleurs), les 24 heures du Mans font le plein de spectateurs. Tout un symbole ...

En fait, je serais revenu dans les gradins à 3h ! Sentant la victoire possible des Peugeot, j’en profite pour me placer juste devant les stands du constructeur français. J’assiste à la profonde inquiétude qui règne quelques minutes plus tard après le grave accident de Benoît Trélulyer sur la Peugeot de l’équipe Pescarolo, puis au soulagement lorsque le français est sorti indemne de l’épave.

La course reprend ses droits, et je peux assister tranquille à l’étrange ballet des voitures transperçant la nuit mancelle. C’est un spectacle saisissant, enivrant et inquiétant à la fois. Notre immense respect envers les pilotes ne prend que plus de dimension à cette heure de la nuit : il faut de sacré couilles pour piloter une voiture à plus de 300km/h dans la nuit noire, avec des phares qui n’éclairent pas beaucoup mieux que les feux de routes de nos voitures de tourisme.

Le lever du soleil est également un moment magique, le spectacle en devient irréel et magique. Et puis, comme la veille, les gradins se remplissent au fur et à mesure de l’avancée de l’horloge. Dès 10h du matin, il n’y a plus moyen de sortir des tribunes sans se faire prendre sa place. La tension grimpe elle aussi, deux Peugeot sont en tête. D’autant plus que de gros nuages viennent assombrir le ciel sarthois. Finalement, seules quelques gouttes feront leur apparition, sans rien changer au déroulement de la course.

Bizarrement, la fin de matinée est calme : on a l’impression que tout le monde retient son souffle, en attendant 15 heures. Ces dernières heures d’ailleurs paraissent sans fin. L’incendie d’une Porsche dans la voie des stands nous redonne de la voix, et à un peu moins d’une heure de l’arrivée, chaque passage des Peugeot est accueilli par les vivas de la foule, et les miens comme de bien entendu. Vers 14h50, les voitures repassent devant nous une avant-dernière fois. La Peugeot n°=8 (Stéphane Sarrazin, Sébastien Bourdais, Franck Montagny,), 2ème, a ralenti pour se faire prendre un tour par sa sœur, la Peugeot n°=9 (David Brabham, Marc Gené, Alexander Wurz) qui occupe la tête, et ainsi offrir aux photographes une bien belle photo de famille. Les voitures qui appartiennent aux mêmes écuries en font de même, comme il est de coutume aux 24 heures du Mans. De même, les commissaires de piste saluent les pilotes au cours de leur dernier tour en agitant leurs drapeaux au passage des voitures.

Dans la tribune des stands, on commence presque à respirer : la victoire n’est plus qu’à 13 kilomètres des Peugeot. Les mécaniciens de la marque au lion sortent de leurs box, et viennent escalader le mur des stands pour y attendre leurs pilotes. Ils ont bien évidemment remarqué que droit devant eux, la tribune des stands est quasiment entièrement acquise à la cause française. Ils vont jouer alors les chauffeurs de salle, en demandant au public une ovation, requête à laquelle nous répondons avec joie, et cela quasiment sas interruption dans ce dernier tour.

Enfin, les voitures apparaissent au loin, à l’entrée des dernières chicanes. Daniel Poissenot, le directeur de la course, agite son drapeau devant la Peugeot n°=9 pilotée par Marc Gené. Je crois qu’il ne manque pas un mécano pour partager, sur le muret des stands, ce moment historique. Ca y’est, Peugeot a enfin remporté les 24 heures du Mans, pour la première fois depuis 1993. C’est du délire dans les tribunes, on se serait vraiment cru au stade de France le 12 juillet 1998 ! On est quelques uns à esquisser une petite larme. Comme dirait Bernard Tapie, c’est idiot, on devrait pas pleurer dans un tel moment ! Les vaillants mécaniciens de Peugeot eux aussi sont en larmes : entre les scènes d’allégresse, ils sont nombreux à nous féliciter, juché sur le mur des stands, en nous désignant du doigt et en applaudissant : cette victoire c’est aussi un peu la nôtre, le soutien que l’on a apporté à la firme française est récompensé.

Toutes les voitures qui franchissent la ligne d’arrivée sont acclamées : avec quand même une mention spéciale aux Lola-Aston Martin ainsi qu’à l’Oreca n°=5 pilotée par Olivier Panis, Nicolas Lapierre et Soheil Ayari, formidables 5èmes de ces 24 heures du Mans, et 1ère voiture essence. Sur le mur des stands, pas une équipe ne manque à l’appel : tous viennent applaudir leurs pilotes. Et chaque pilote lui aussi remercie la foule et son équipe, peu importe qu’il ait terminé premier ou dernier. C’est ça le Mans, une communion géniale entre le pilote, son équipe, et la foule.

A peine le temps de nous remettre de ces émotions qu’il faut se précipiter hors des tribunes pour pénétrer sur la piste et se retrouver le plus près possible du podium. C’est de nouveau l’ovation générale quand les vainqueurs entrent sur le podium, et de nouveau on chante la Marseillaise pour célébrer la victoire de Peugeot. Après la traditionnelle douche au champagne, je termine pour ma part ces 24 heures du Mans par un court passage dans les paddocks, d’où sortent justement Olivier Panis et le patron d’Oreca Hugues de Chaunac tous sourires, qui sont acclamés et félicités pour leur exploit.

Voilà, c’est fini ! Il est temps de se diriger vers la sortie, prendre le tramway, et rejoindre la gare du Mans. Bilan du week-end ? Plein de coups de soleil sur la figure, un jean troué, un portefeuille qui a entièrement pris l’eau, des kilomètres avalés à pied, mais surtout des moments inoubliables. J’en ai eu pour mon argent, et si plus jamais je ne retournerais sur un grand prix de F1, il est en revanche certain que je reviendrais aux 24 heures du Mans. Et cela dès l’an prochain, je l’espère !

dimanche 27 septembre 2009

L'histoire de la formule 1 : 4ème épisode, Mika Häkkinen (1ère partie)

La Finlande ne fait pas partie des nations les plus prolifiques en pilotes de grands prix. Cependant, la majeure partie de ces pilotes menèrent une grande carrière.A l’occasion de son 41ème anniversaire, gros plan aujourd’hui sur l’un d’entre eux, Mika Häkkinen.

Mika nait le 28 septembre 1968 à Vantaa, dans l’agglomération d’Helsinki en Finlande. Très vite, son goût pour la compétition automobile se révèle au grand jour puisqu’à 5 ans il se retrouve au volant d’un karting ! Le jeune Mika est décidemment bien précoce : il remporte sa 1ère course à 7 ans, et son premier championnat à 10 ans ! Tel un météore dans le ciel finlandais, Hakkinen survole ses adversaires partout où il passe : entre 1979 et 1986 il remporte la bagatelle de 6 titres ! En 1987 il accède logiquement à la formule Ford, en disputant le championnat scandinave qu’il remporte haut la main.

La Finlande semble avoir trouvé un successeur à Keke Rosberg, champion du monde F1 1982 et qui a pris sa retraite en 1986. Mais pour cela, Mika Häkkinen doit impérativement se distinguer hors des frontières nordiques. C’est chose faite en 1988 lorsqu’il dispute, et remporte brillament, le championnat européen de formule Opel. Ce coup d’éclat le propulse dans le très relevé championnat anglais de Formule 3. C’est à ce moment que le jeune Häkkinen est pris en mains par ce même Keke Rosberg, qui gère déjà la carrière de son compatriote JJ Lehto, qui débute sa carrière en formule 1 à ce moment-là.

Cette même année Häkkinen termine 7ème du championnat britannique de F3, qu’il remporte de main de maître l’année suivante devant son compatriote Mika Salo. Et ce n’est pas tout ! Mika s’offre une excursion dans le championnat allemand de F3, pour y affronter l’une des étoiles montantes du sport automobile germanique, un certain Michael Schumacher… Mais le futur septuple champion du monde F1 est battu à plates coutures par le blond finlandais, qui remporte l'épreuve d’Hockenheim, avec en bonus la pôle position et le meilleur tour en course.

Les deux hommes se retrouvent quelques semaines plus tard à Macao, une enclave portugaise en Chine qui accueille chaque année le plus prestigieux des grands prix de F3. Häkkinen y remporte la 1ère course, mais lors de la 2ème est bloqué derrière le leader, Michael Schumacher. C’est pourtant le finlandais, au classement cumulé, qui occupe la tête du meeting. Il pourrait se contenter d’une deuxième place dans cette deuxième course … mais non.

A l’abord du dernier tour, Häkkinen se blottit dans l’aspiration de la monoplace de Schumacher. Le finlandais déboîte, se porte à la hauteur de l'allemand qui se rabat sur son rival ! Häkkinen part en tête-à-queue, et vient frapper violemment les rails du circuit urbain de Macao. Schumacher parvient à boucler ce dernier tour sans aileron arrière, et remporte le grand prix de Macao de F3. Inutile de dire qu’Häkkinen, même s’il n’en laisse rien transparaître, est furieux. Et dans son for intérieur, il espère pouvoir se venger, un jour ou l’autre …

Malgré cette déception de fin de saison, le talent d’Häkkinen n’est pas passé inaperçu : ainsi, l’écurie Lotus le recrute pour la saison 1991 de formule 1. Alors bien entendu, l’équipe britannique n’est plus ce qu’elle était, et elle se bat aujourd’hui plutôt pour la qualification que pour la victoire. Pour son premier grand prix à Phoenix, Häkkinen signe un excellent 13ème chrono en qualifications. En course, il se fait un grosse peur lorsque son volant se bloque dans la ligne droite des stands !

Pour son 3ème grand prix, disputé sur un piste d’abord humide puis s’asséchant, le protégé de Keke Rosberg termine 5ème, inscrivant ses deux premiers points au championnat du monde ! La suite de la saison est malheureusement moins bonne : handicapé par son V8 Judd, le moteur le moins puissant du plateau, Häkkinen n’inscrira plus aucun point.

Cela ne l’empêche pas de rempiler chez Lotus l’année suivante. Une équipe où il se sent bien, l’ambiance y est conviviale, surtout avec son équipier Johnny Herbert. L’équipe britannique a troqué ses V8 Judd pour des traditionnels Ford-Cosworth, un peu plus puissants. Le début d’année, sur la monoplace de 1991 faiblement modifiée, est difficile. Hakkinen parvient pourtant à marquer le point de la 6ème place à Mexico après un départ explosif qui l’a vu passer de la 18ème à la 9ème place ! La nouvelle voiture, la Lotus 107, arrive à Monaco. Les résultats s’en ressentent très vite : Häkkinen se qualifie désormais en milieu de grille, et à Magny-Cours il signe une étonnante 4ème place, arrachée de haute lutte dans l’avant-dernier tour à la Ligier-Renault d’Erik Comas. Une semaine plus tard il termine 6ème du GP de Grande-Bretagne. Il est également 4ème du GP de Hongrie, 6ème du GP de Belgique, et 5ème du GP du Portugal. Mais son principal fait d’arme reste le GP du Japon à Suzuka. Alors qu’il occupe la 4ème place, Nigel Mansell alors 2ème renonce à 9 tours du but. Häkkinen semble alors pouvoir monter sur le podium,(le 1er pour Lotus depuis le GP d’Australie 1988). Las ! Une casse moteur le contraint à l’abandon. Le bilan de cette saison est néanmoins flatteur pour Häkkinen : avec 11 points, il est 8ème du championnat pilotes, alors que son équipier Herbert termine 14ème avec 2 points.

Blond, visage poupin, espiègle et surtout très charmeur, Häkkinen fait l’unanimité autour de lui. Et il est bien entendu très convoité… C’est Ron Dennis qui l’engage, en lui proposant le poste de pilote d’essais chez McLaren, qui a déjà donné sa parole à Michael Andretti pour l’obtention du 2ème volant aux côtés d’Ayrton Senna. Qu’à cela ne tienne, Mika va pendant ce temps disputer la coupe Porsche, en lever de rideau des grands prix (il remporte 2 victoires). Puis il est appelé en fin d’année pour succéder à Andretti, dont les performances plus que médiocres le renvoyèrent aux Etats-Unis.

Häkkinen va donc débuter sa saison 1993 sur une McLaren-Ford à Estoril, un des circuits les plus exigeants du calendrier, et avec à ses côtés un certain Ayrton Senna … Pas intimidé pour un sou, Häkkinen signe le 3ème temps des qualifs, juste devant son équipier Ayrton Senna ! Le brésilien qui va d’ailleurs rester de longues minutes devant les relevés télémétriques, à chercher comment le finlandais a-t-il pu le battre ! En course, le finlandais pêche par manque d’expérience et s’offre une violente sortie de piste. 15 jours plus tard il est de nouveau 3ème des essais du GP du Japon (derrière Senna cette fois-ci), et rallie l’arrivée à cette même 3ème place. Sur son premier podium en formule 1, il retrouve le vainqueur Ayrton Senna, et le 2ème Alain Prost, 7 titres et plus de 90 victoires à eux deux !).

Ayrton Senna parti chez Williams, Mika Häkkinen est bien entendu confirmé chez McLaren pour 1994, et se voit astreindre le britannique Martin Brundle pour équipier. Mais les McLaren ont troqué leur V8 Ford-Cosworth pour le tout nouveau V10 Peugeot. Un moteur certes puissant, mais souffrant de nombreux défauts de jeunesse. Après 2 abandons à Interlagos et Aïda, Häkkinen renoue avec le podium lors du sinistre GP de Saint-Marin qu’il termine à la 3ème place. Auteur d’une remarquable 2ème position sur la grille à Monaco, il est éliminé d’entrée après un accrochage avec Damon Hill. Suivent ensuite 3 abandons consécutifs sur casse moteur, alors qu’il occupait des places dans les points.

Le finlandais est de retour sur le podium à Silverstone, après le déclassement de Michael Schumacher. 3 semaines plus tard, il est à l’origine d’un carambolage monstrueux au départ du GP d’Allemagne (10 voitures éliminées !), qui lui vaut une suspension d’un grand prix. Et il faut croire que ce repos forcé est bénéfique au finlandais qui signe ensuite 4 podiums consécutifs, avec en point d’orgue une 2ème place au GP de Belgique. Il termine la saison par 2 fausses notes, une 7ème place à Suzuka et enfin une violente sortie de route à Adélaïde. Pas de quoi cependant assombrir le tableau d’une saison globalement bonne (les casses mécaniques lui ont tout de même coûté de nombreux points) : il est 4ème du championnat pilotes, avec 26 points et 6 podiums, tout en dominant assez largement son équipier Martin Brundle.

Mika reste chez McLaren, où l’on change pour la 3ème fois en 3 ans de moteurs ! Le V10 Peugeot est remplacé par le V10 Mercredes. C’est le début d’une collaboration qui dure encore aujourd’hui … Häkkinen est rejoint par un monument du sport automobile : Nigel Mansell, qui a 41 ans rempile pour une 16ème saison !HeH Enfin, pas tout à fait : le britannique est en effet trop gros pour sa McLaren-Mercedes ! Pour les deux premières courses de l’année, c’est le pilote-essayeur Mark Blundell qui épaule Häkkinen. Il débute sa saison par une 4ème place à Interlagos, avant d’abandonner au départ du GP d’Argentine. Lors du retour du F1 circus en Europe à Imola, Mansell est de retour chez McLaren. Il est un temps 4ème avant de rétrograder au 10ème rang après un accrochage avec Eddie Irvine. Quant à Hakkinen, il rallie l’arrivée en 5ème position.

Il ne le sait pas encore, mais c’est le début d’une disette qui va durer plus de 4 mois ! Pas un seul point de marqué pendant ce laps de temps, et cela malgré des débuts de course souvent intéressants. Häkkinen fait son retour dans les points à Monza, où il termine 2ème après une course par élimination. Un mois plus tard, il réédite cet exploit sur le circuit japonais de Suzuka. C’est donc avec la confiance retrouvée que Mika débarque à Adélaïde pour le dernier grand prix de l’année.

Mais dès le vendredi, c’est le drame. Durant la 1ère séance d’essais qualificatifs, le pneu arrière droit de la McLaren-Mercedes crève, alors qu’Häkkinen aborde la courbe la plus rapide du circuit (un droite négocié à environ 220 km/h). Au moment ou Häkkinen braque pour inscrire sa McLaren dans la courbe, la monoplace est déséquilibrée, part en tête-à-queue et s’envole sur le vibreur. Elle retombe plusieurs mètres plus loin, et vient taper le mur en béton faiblement protégé par une seule rangée de vieux pneus.

Sous la violence du choc, le casque d’Häkkinen a cassé le volant en deux. Le finlandais est dans un état critique : il ne respire plus. Heureusement, dans le poste de commissaires voisin se trouvent un anesthésiste et un chirurgien. Ils accourent sur les lieux du drame, et tentent d’intuber le pilote finlandais. Impossible : sa mâchoire est bloquée. Les deux médecins décident alors de procéder à une trachéotomie de fortune, à même la piste, en lui incisant la gorge. Ils viennent de lui sauver la vie. Häkkinen respire de nouveau, et il est transporté à l’hôpital d’Adélaïde où il est placé en coma artificiel. 24 heures plus tard, Mika se réveille et se rend compte qu’il est dans un hôpital. En voyant l’un des docteurs, il promène deux doigts sur sa poitrine : pourra-t-il remarcher ? Le docteur Lewis lui répond dans un grand sourire, avec le pouce en l’air. Mika se rendort, rassuré : il sait désormais qu’il peut remarcher, et à fortiori piloter de nouveau.

Si cet accident ne laissa aucune séquelle physique à Mika Häkkinen, il le laissa en revanche profondément changé. Autrefois espiègle, un peu « chien fou » le finlandais devient plus calme, réfléchi et introverti.

Or on se souvient notamment de Karl Wendlinger, qui après un terrible accident début 1994, était revenu en formule 1 l’année suivante, mais a du par la suite jeter l’éponge : s’il pouvait reconduire, c’était à plusieurs secondes des meilleurs …

Début 1996 se pose alors la même question pour Häkkinen : pourra-t-il retrouver son meilleur niveau en formule 1 ?


(à suivre ...)

dimanche 20 septembre 2009

Les grands prix de légende / 1er épisode : GP du Portugal 1987

Salut à tous ! Me voilà de retour après une longue absence, marquée notamment par des passages à la télé et à la radio. Si seulement ça pouvait me faire encore plus connaître dans le milieu …

Bref ! Aujourd’hui, je vais débuter une nouvelle série, celle des courses de légende. Et pour commencer, je vais vous parler du GP du Portugal 1987, disputé le 20 septembre 1987, il y’a donc 22 ans jour pour jour.


En cette année 1987, la formule 1 débute une des plus importantes mutations de son histoire : l’époque des moteurs turbos touche à sa fin, et la FISA (Fédération Internationale du Sport Automobile) a annoncé le retrait de ce type de motorisation à la fin de l’année 1988. Dès lors, quelques équipes ont d’ores et déjà abandonné le turbo pour s’équiper de nouveau en moteurs atmosphériques, le Ford-Cosworth DFZ en l’occurrence qui équipe Tyrrell, AGS, March, et Lola Larrousse. D’ailleurs deux trophées spécifiques ont été crées spécialement pour ces monoplaces à motorisation atmosphérique : le trophée Jim Clark qui récompense le meilleur pilote équipé par un moteur atmosphérique, et le trophée Colin Chapman qui récompense la meilleure écurie utilisant ce type de moteurs. Ces trophées sont alors dominés par Jonathan Palmer et l’équipe Tyrrell.

Cependant, toutes ces petites équipes sont encore largement dominées par les moteurs turbos qui équipent la majorité des écuries de formule 1. De ce fait, les Williams-Honda sont les grandes dominatrices de cette saison 1987 puisqu’au terme de la 11ème épreuve du championnat, le GP d’Italie, c’est Nelson Piquet (Williams-Honda) qui occupe la tête du championnat du monde des pilotes avec 63 points, 14 unités devant Ayrton Senna (Lotus-Honda), et 20 devant son équipier Nigel Mansell. Le tenant du titre Alain Prost n’occupe que la 4ème place de ce classement avec 31 points. Autant dire qu’en arrivant à Estoril, théâtre de la 12ème des 16 épreuves de ce championnat 1987, le natif de Saint-Chamond n’a quasiment plus aucune chance de glaner un 3ème titre consécutif. La faute au moteur TAG-Porsche, dépassé techniquement par son homologue japonais Honda, qui équipe Williams et Lotus. Cependant, ses deux victoires en début d’année à Rio et Spa-Francorchamps ont permis à Prost d’égaler le record du nombre de victoires en grands prix, détenu par Jackie Stewart avec 27 succès. Mais depuis, Alain n’a jamais pu remonter sur la plus haute marche du podium, et s’emparer seul de ce prestigieux record.

Estoril accueille donc la 12ème épreuve du championnat 1987, le GP du Portugal. Un grand prix capital, notamment pour Mansell qui doit absolument réagir pour combler l’écart qui le sépare de son équipier Nelson Piquet. Mais ce grand prix débute déjà par une surprise, avec l’étonnante pôle position de Gerhard Berger sur Ferrari, la 1ère pour la marque Italienne depuis le GP du Brésil 1985 ! Le jeune autrichien devant sur la grille Nigel Mansell, Alain Prost qui signe un excellent 3ème chrono devant Nelson Piquet et Ayrton Senna. Voici l’intégralité de la grille de départ :

1) Gerhard Berger (AUT) Ferrari V6 Turbo (1’17’’620)
2) Nigel Mansell (GB) Williams-Honda V6 Turbo (1’17’’951)
3) Alain Prost (FRA) McLaren-TAG Porsche V6 Turbo (1’17”994)
4) Nelson Piquet (BRA) Williams-Honda V6 Turbo (1’18”164)
5) Ayrton Senna (BRA) Lotus-Honda V6 Turbo (1’18’’354)
6) Michele Alboreto (ITA) Ferrari V6 Turbo (1’18’’540)
7) Riccardo Patrese (ITA) Brabham-BMW L4 Turbo (1’19’’965)
8) Stefan Johansson (SWE) McLaren-TAG Porsche V6 Turbo (1’20”134)
9) Thierry Boutsen (BEL) Benetton-Ford V6 Turbo (1’20”305)
10) Teo Fabi (ITA) Benetton-Ford V6 Turbo (1’20’’483)
11) Eddie Cheever (USA) Arrows-Megatron L4 Turbo (1’21”207)
12) Derek Warwick (GB) Arrows-Megatron L4 Turbo (1’21’’397)
13) Andrea De Cesaris (ITA) Brabham-BMW L4 Turbo (1’21”725)
14) Alessandro Nannini (ITA) Minardi-Motori Morderni V6 Turbo (1’21’’784)
15) Satoru Nakajima (JAP) Lotus-Honda V6 Turbo (1’22’’222)
16) Christian Danner (GER) Zakspeed L4 Turbo (1’22”358)
17) Martin Brundle (GB) Zakspeed L4 Turbo (1’22’’400)
18) René Arnoux (FRA) Ligier-Megatron L4 Turbo (1’23’’237)
19) Philippe Alliot (FRA) Lola Larrousse-Ford Cosworth V8 Atmo (1’23’’580)
20) Adrian Campos (SPA) Minardi-Motori Moderni V6 Turbo (1’23’’591)
21) Philippe Streiff (FRA) Tyrrell-Ford Cosworth V8 Atmo (1’23’’810)
22) Ivan Capelli (ITA) March-Ford Cosworth V8 Atmo (1’23’’905)
23) Piercarlo Ghinzani (ITA) Ligier-Megatron L4 Turbo (1’24’’105)
24) Jonathan Palmer (GB) Tyrrell-Ford Cosworth V8 Atmo (1’24”217)
25) Alex Caffi (ITA) Osella-Alfa Romeo V8 Turbo (1’24’’792)
26) Franco Forini (ITA) Osella-Alfa Romeo V8 Turbo (1’26’’635)
Non qualifié) Pascal Fabre (FRA) AGS-Ford Cosworth V8 Atmo (1’26’’946)


Le 1er départ de la course est d’abord avorté sur à un carambolage survenu au 1er virage, et qui a contraint les officiels à déployer le drapeau rouge. Tous les pilotes peuvent repartir à l’exception de l’allemand Christian Danner sur Zakspeed.

Au 2nd départ c’est Mansell qui prend la tête des opérations devant Berger, Senna, Piquet et Prost. Mais Mansell ne gardera son avantage qu’un tour, puisqu’au 2ème passage devant les stands, Berger reprend la tête de la course. Au tour suivant c’est son équipier Michele Alboreto qui passe l’attaque et prends à Prost la 5ème place. Les positions ne changent pas jusqu’au 10ème tour : Berger compte 4 secondes d’avance sur Mansell, 9 sur Senna et Piquet, 11 sur Alboreto et Prost. 3 tours plus tard, Senna doit observer un long arrêt aux stands de 2 tours pour y résoudre des problèmes mécaniques, alors qu’au même moment Mansell renonce, en panne d'électricité ! Le classement est donc chamboulé : Berger mène toujours, avec 10 secondes d’avance sur le nouveau 2nd, Nelson Piquet. Alboreto est 3ème à 14 secondes juste devant Alain Prost tandis que les Benetton-Ford de Boutsen et Fabi occupent les 5ème et 6ème rangs à respectivement 17 et 24 secondes du leader.

Au 22ème des 70 tours de course, c’est au tour de Boutsen de connaître des ennuis : il doit stopper 8 minutes au stand Benetton pour y changer ses bougies, ainsi que le boitier électronique. Au 30ème tour Piquet rentre lui aussi aux stands, mais pour un simple changement de pneus. Il repart 5ème derrière Fabi. 2 tours plus tard Prost stoppe lui aussi, et repart devant Nelson Piquet. 34ème tour, c’est Berger qui change ses roues, laissant le leadership à son équipier Alboreto qui l’imite deux tours plus tard. Fabi est le dernier des hommes de tête à effectuer cette opération au 38ème tour, au même moment Alboreto abandonne sa Ferrari, boîte de vitesses cassée.

Au 40ème tour, Berger occupe toujours la tête du grand prix 16 secondes devant Prost, talonné par Nelson Piquet. Fabi est 4ème à 19 secondes, loin devant De Cesaris 5ème à 1’04 et Johansson 6ème sur ses talons. Il reste 30 tours à couvrir.

C’est le moment où Alain Prost décide de montrer toute l’étendue de son talent, en remontant méthodiquement sur Berger. Les remontées de Prost n’ont rien à voir avec celles de Senna ou Mansell, marquées par un pilotage spectaculaire. Non, les remontées « à la Prost » sont des remontées qui se font petit à petit, sans jamais maltraiter la mécanique. 5 petits dixièmes par ci, 2 autres par là, rien à voir avec les écarts qui dépassent parfois la seconde chez Mansell ou Senna.

Ainsi, au 50ème tour, Prost compte toujours 12 secondes de retard sur Berger. Piquet est toujours 3ème mais il a lâché prise. Fabi, Johansson et De Cesaris complètent le top 6.
La fin de course approchant, Prost continue d’enfoncer le clou et remonte de plus en plus vite sur Berger : à 10 tours du but, Prost n’est plus qu’à 3 secondes de la Ferrari de l’Autrichien. L’issue paraît inexorable, et tout le monde s’attend à voir Berger abdiquer. Et pourtant non, l’écart se stabilise autour des 3 secondes. Berger semble avoir la course en mains, Prost ne semble pas en mesure d’inquiéter la Ferrari. Erreur ! Prost est en train d’appliquer une tactique d’une intelligence rare : revenu à 3 secondes de Berger, Prost a laissé ensuite se stabiliser l’écart pour « endormir » Berger. Et puis, Prost repasse à l’attaque. Il signe son meilleur tour en course au 65ème tour, et revient à 2 secondes de Berger. L’autrichien réplique, et au 66ème tour il prend à Prost le meilleur tour. On sent les deux pilotes sur le fil du rasoir, le chaos est proche : il frappe Berger. Dans le 68ème tour, l’autrichien, mis sous pression, part en tête-à-queue. Prost passe en tête, à 2 tours de l’arrivée, il ne la quittera plus.

Alain Prost franchit la ligne d’arrivée en vainqueur : l’explosion de joie d’Alain, et de l’équipe McLaren est à la hauteur de l’exploit réalisé. Prost remporte sa 28ème victoire en carrière, devenant du même coup le recordman du nombre de victoires en grand prix. Il devient, définitivement, le plus grand pilote de son époque.

Classement final du GP du Portugal :
1) Alain Prost (FRA) McLaren-TAG Porsche V6 Turbo (1h37'03"906)
2) Gerhard Berger (AUT) Ferrari V6 Turbo (à 20"493)
3) Nelson Piquet (BRA) Williams-Honda V6 Turbo (à 1'03"295)
4) Teo Fabi (ITA) Benetton-Ford V6 Turbo (à 1 tour, panne d'essence)
5) Stefan Johansson (SWE) McLaren-TAG Porsche V6 Turbo (à 1 tour)
6) Eddie Cheever (USA) Arrows-Megatron L4 Turbo (à 2 tours)
7) Ayrton Senna (BRA) Lotus-Honda V6 Turbo (à 2 tours)
8) Satoru Nakajima (JAP) Lotus-Honda V6 Turbo (à 2 tours)
9) Ivan Capelli (ITA) March-Ford Cosworth V8 Atmo (à 3 tours)
10) Jonathan Palmer (GB) Tyrrell-Ford Cosworth V8 Atmo (à 3 tours)
11) Alessandro Nannini (ITA) Minardi-Motori Moderni V6 Turbo (à 4 tours, panne d'essence)
12) Philippe Streiff (FRA) Tyrrell-Ford Cosworth V8 Atmo (à 4 tours)
13) Derek Warwick (GB) Arrows-Megatron L4 Turbo (à 4 tours)
14) Thierry Boutsen (BEL) Benetton-Ford V6 Turbo (à 6 tours)
AB) Andrea De Cesaris (ITA) Brabham-BMW L4 Turbo (54ème tour, alimentation)
AB) Michele Alboreto (ITA) Ferrari V6 Turbo (38ème tour, boîte de vitesses)
AB) Martin Brundle (GB) Zakspeed L4 Turbo (35ème tour, boîte de vitesses)
AB) Franco Forini (ITA) Osella-Alfa Romeo V8 Turbo (32ème tour, roulement de roue)
AB) Philippe Alliot (FRA) Lola Larrousse-Ford Cosworth V8 Atmo (31ème tour, pompe à essence)
AB) René Arnoux (FRA) Ligier-Megatron L4 Turbo (29ème tour, radiateur)
AB) Alex Caffi (ITA) Osella-Alfa Romeo V8 Turbo (27ème tour, turbo)
AB) Piercarlo Ghinzani (ITA) Ligier-Mégatron L4 Turbo (24ème tour, embrayage)
AB) Adrian Campos (SPA) Minardi-Motori Moderni V6 Turbo (24ème tour, radiateur)
AB) Nigel Mansell (GB) Williams-Honda V6 Turbo (13ème tour, électricité)
AB) Riccardo Patrese (ITA) Brabham-BMW L4 Turbo (13ème tour, moteur)
AB) Christian Danner (GER) Zakspeed L4 Turbo (0 tours, accident)

La bonne opération du jour est cependant à mettre au crédit de Nelson Piquet, qui compte désormais 18 points d'avance sur son dauphin, Ayrton Senna. Le pilote de la Williams-Honda est le grand favori du championnat 1987, qu'il remportera d'ailleurs quelques semaines plus tard.
Alain Prost ne terminera que 4ème du championnat cette saison, et malgré cela, l'année 1987 fut pour lui un grand cru grâce à l'obtention de ce record du nombre de victoires en grands prix. Finalement, Prost achèvera sa carrière avec 51 victoires. Il détiendra ce formidable record jusqu'au GP de Belgique 2001, au terme duquel Michael Schumacher remportera sa 52ème victoire en grand prix.

lundi 31 août 2009

L'histoire de la formule 1 : 3ème épisode, Jean Alesi


Alors que je me prélassais tranquillement dans mon siège de 1ère classe dans le train dimanche dernier, j’ai été pris d’une soudaine envie d’écrire ! C’est alors que le chef de bord annonça notre arrivée en gare d’Avignon. Or, pour tout fan de F1, évoquer Avignon c’est évoquer Jean Alesi.



Jean est né le 11 juin 1964 en Avignon. Mais c’est bel et bien en Italie que remontent ses origines (son vrai prénom est Giovanni), et plus précisément en Sicile d’où est arrivé son père Frank à 19 ans. Ce dernier exerce le métier de carrossier, et bien évidemment, Jean Alesi contracte le virus de la course. Après avoir passé ses jeunes années à supporter son père pilote dans des courses de côte, Jean franchit le pas en 1981 et dispute la ligue Provence-Alpes-Côte d’Azur de karting. Brillant 2nd pour sa 1ère année, Alesi remporte le titre régional l’année suivante.
Il s’oriente ensuite vers les berlines en s’engageant dans la coupe Renault 5 Turbo. La saison est difficile, mais Jean parvient tout de même à remporter une victoire à Nogaro, dans des conditions dantesques. Déjà, Alesi s’impose comme un redoutable client sur le mouillé.

La famille Alesi se rend néanmoins compte que si Jean veut faire carrière, il faut pour cela briller en monoplace. Pour se faire, Jean participe au volant Elf, qui récompense le plus rapide des pilotes de cette session par une saison en formule Renault. Mais Alesi termine 2ème derrière Eric Bernard, que le jury a autorisé à repartir après un tête-à-queue. Malgré cette controverse, Jean tente de laver l’affront en s’alignant avec sa propre structure (composée du père de Jean, son frère José et un mécano retraité !) dans ce championnat de France de Formule Renault. L’année n’est ponctuée que d’une 2nde place, mais 1985 sera un meilleur cru puisque Jean termine 5ème du championnat, derrière des pilotes du calibre d’Eric Bernard et Erik Comas.

Son passage en formule 3 n’est donc pas étonnant, ce qui l’est davantage c’est son choix de châssis, puisqu’Alesi fait importer un châssis Dallara sur lequel il greffe un moteur Alfa Romeo, grâce à la générosité de son sponsor, la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs). Pour une fois, Jean se retrouve avec un bon matériel entre les mains, et il va en faire bon usage en terminant vice-champion derrière Yannick Dalmas.

Il est alors pris en mains par Hugues de Chaunac, le patron de l’équipe Oreca, véritable épouvantail dans le microcosme du sport auto tricolore. Mais l’équipe aligne des châssis Martini, dont Jean s’avère vite très mécontent. Alors à Nogaro, Jean emprunte la voiture de l’équipe de son frère (une Dallara), et remporte la course devant les yeux médusés de l’écurie Oreca, qui troqua séance tenante ses châssis Martini pour des Dallara ! Jean aligne alors une série impressionnante de 7 victoires, qui font de lui le champion de France de F3 1987.

Oreca, qui aligne aussi des voitures en formule 3000 le fait logiquement grimper d’un échelon en l’alignant de l’antichambre de la formule 1. Cette année de rodage est difficile, Jean ne termine que 10ème du championnat avec 11 points, et un podium dans les rues de Pau (2ème). En fin d’année, il dispute le prestigieux grand prix de F3 de Macao qu’il mène largement avant l’éclatement d’un pneu. Eddie Jordan (patron d’une écurie concurrente en F3000) remarque les exploits de l’Avignonnais et l’enrôle pour la saison 89. Jean passe du coup du mécénat de Marlboro à celui de Camel, ce qui aura de lourdes conséquences …

Au sein de l’équipe dominante dans ce championnat, Alesi va faire des étincelles en remportant le grand prix de Pau, avant de prendre la tête du championnat lors de l’épreuve suivante le 4 juin. Quelques jours plus tard, à l’échelon supérieur (la formule 1) Ken Tyrrell se débat pour trouver des sponsors. Il déniche un contrat avec le cigaretter Camel, ce qui provoque le départ de son pilote n°=1 Michele Alboreto, sous contrat avec le concurrent direct de Camel, Marlboro ! Tyrrell doit alors trouver un remplaçant à l’Italien, et pourquoi pas quelqu’un sous contrat avec Camel …

Alesi est contacté par Tyrrell, qui parvient à convaincre Eddie Jordan de lui prêter son protégé. Il va donc pouvoir faire ses débuts en formule 1, sur le circuit Paul Ricard pour le GP de France.

Qualifié 16ème à 6/10èmes de son équipier Jonathan Palmer, Jean Alesi va effectuer une course sensationnelle qui le mènera à la 4ème place finale, alors même qu’il occupait la 2ème place avant de changer ses pneus ! Ken Tyrrell peut exulter, il vient une nouvelle fois de mettre la main sur un petit prodige. Alesi est bien évidemment prolongé chez Tyrrell, même s’il continue à piloter en F3000 pour tenter d’y remporter le titre. Il réalise un autre exploit en F1 à Monza en finissant 5ème, malgré la faiblesse de son petit V8 Ford-Cosworth ; puis encore un autre à Jerez où il termine à une époustouflante 4ème place. Il est finalement 9ème du championnat avec 8 points, et cela en ayant disputé seulement la moitié des courses !
En F3000, ses victoires à Birmingham et Spa-Francorchamps lui permettent de devenir champion intercontinental, au terme d’une année en touts points éblouissante.

Et 1990 commence de la même manière, par un exploit ! Qualifié 4ème dans les rues de Phoenix, Alesi prend la tête du grand prix jusqu’au 35ème tour, moment où Ayrton Senna le dépasse … avant qu’Alesi ne reprenne la tête au virage suivant au prix d’une manœuvre extraordinaire ! Mais la petite Tyrrell-Ford V8 ne peut rien face à la McLaren-Honda V10, et Senna prend définitivement la tête du grand prix au tour suivant. Perclus d’ampoules aux mains, Alesi n’en sauve pas moins une magnifique 2ème place, synonyme de 1er podium en F1.

3 courses plus tard, Jean réalisé un nouvel exploit (encore un !) dans les rues tortueuses et piégeuses de Monaco. Qualifié à une étonnante 3ème place, Alesi harcèle le 2nd, Alain Prost, avant que celui-ci ne se retire au 30ème tour. Alesi hérite alors d’une deuxième place qu’il sauvera in extremis des assauts de Gerhard Berger, équipier chez McLaren de Senna, vainqueur de ce grand prix. Mais la suite de l’année sera plus décevante, Jean ne marquant plus aucun point. Néanmoins, avec 13 points marqués et une 9ème place au classement, le bilan est plus qu’honorable.

Au cours de cette année 1990, Jean a du faire face à un choix cornélien. Son statut de petit prodige fait de lui un pilote très convoité, notamment par Williams-Renault et Ferrari. Alesi opte d’abord pour l’équipe Anglo-française. Mais Alesi apprend que Frank Williams négocie en parallèle avec Ayrton Senna (qui ne viendra finalement pas), et se dresse alors sur ses ergots. Il devient une proie plus que facile pour Ferrari. Pour un pilote aux origines Italiennes, piloter pour Ferrari c’est comme rentrer dans les ordres, et Alesi rejoint son compatriote Alain Prost chez les rouges pour 1991. Presque 20 ans plus tard, on mesure l’ampleur de ce geste … L’équipe Williams-Renault allait en effet dominer la F1 entre 1991 et 1994 (titres mondiaux pour Mansell en 1992 et Prost en 1993). Imaginez si Jean avait fait partie de cette aventure …

Malheureusement, le rêve que l’on imaginait s’effondre très vite. La Ferrari est loin d’être une foudre de guerre, et Jean ne pourra faire mieux qu’une 7ème place au classement final avec 21 points et trois 3èmes place à Monaco, Hockenheim (GP d’Allemagne) et Estoril (GP du Portugal). A noter qu’il était en passe de remporter le GP de Belgique avant qu’une casse moteur ne le contraigne à l’abandon à 15 tours de l’arrivée.

Alain Prost licencié, Alesi voit arriver Ivan Capelli, lui aussi brillant espoir de la formule 1, pour 1992. Mais si 1991 fut décevante, 1992 sera décourageante. Au volant d’une monoplace aussi poussive que rétive, Jean n’inscrira que 18 points, dont 2 podiums à Barcelone et Montréal. La débâcle est totale pour Ferrari qui ne marque que 21 points cette année là !

Un manque de résultat fatal à Capelli, remplacé en fin d’année par le pilote essayeur Nicola Larini, avant l’arrivée de Gerhard Berger pour 1993. Mais l’année est toute aussi catastrophique, Ferrari ne marquant que 28 points et manquant de se faire passer par Ligier avec 21 points ! Alesi marque 16 points, avec pour seules satisfactions une 3ème place à Monaco et une superbe 2ème place à Monza, le temple des tifosis.

Avec l’arrivée de Jean Todt à l’été 1993, tous les observateurs attendent beaucoup de la Scuderia en 1994. Cela commence plutôt bien pour Jean qui termine 3ème du 1er GP de l’année au Brésil. Mais Jean frôle le drame quelques jours plus tard lorsqu’il se blesse aux cervicales après une violente sortie de piste survenue lors d’essais privés à Fiorano. Indisponible pour 2 grands prix, Alesi fait son retour à Monaco. La suite de l’année sera contrastée. Si Alesi effectue de belles courses (3ème à Montréal, 2ème à Silverstone), il ne parvient toujours pas à concrétiser ces promesses par une victoire. A Hockenheim, alors qu’il part en 1ère ligne aux côtés de son équipier Berger, Alesi est victime d’une casse moteur dès la 1ère ligne droite laissant l’autrichien Berger remporter la victoire, la 1ère d’une Ferrari depuis 4 ans. Dès lors, la fin de l’année sera encore plus difficile pour Jean. Il abandonne au GP de Belgique dès le 2ème tour alors qu’il était 2ème. Pire, à Monza, pour le GP d’Italie : Alesi signe sa 1ère pôle en carrière en 81 grands prix. Au départ, le français s’envole et compte 11 secondes d’avance au 15ème tour, moment de son 1er ravitaillement. Une fois l’opération effectuée, la Ferrari reste clouée à son stand, boîte de vitesses cassée. C’est un Alesi hors de lui qui s’extrait de sa monoplace jetant volant, gants et casque dans le stand Ferrari.

La seule éclaircie en cette fin d’année viendra lors du GP du Japon disputé dans des conditions apocalyptiques, ce qu’affectionne tout particulièrement Alesi. Après une bataille titanesque avec la Williams de Nigel Mansell, Alesi arrache de haute lutte la 3ème place. Avec 24 points, Alesi est 5ème du championnat, 2 places derrière Berger.

1994 fut l’année de Berger, 1995 sera celle d’Alesi. Il signe en début d’année 2 2èmes places coup sur coup à Buenos Aires et Imola, avant de renoncer à deux reprises à Barcelone et Monaco (il occupait à chaque fois la 2ème place).

Puis arrive ce fameux 11 juin 1995, jour du 31ème anniversaire de Jean Alesi. Lors de ce GP du Canada, Alesi part en 5ème position mais s’installe très vite en 3ème position avant de doubler avec autorité Damon Hill. Il se retrouve 2ème, derrière l’inamovible Michael Schumacher. On s’achemine vers une nouvelle 2ème place de Jean lorsqu’au 58ème des 69 tours prévus, Schumacher passe au ralenti ! Après un arrêt d’une minute pour identifier la panne, l’Allemand repart 8ème. Alesi est en tête ! Et il le restera. C’est sous une ovation rarement atteinte que Jean Alesi franchit en vainqueur la ligne d’arrivée de ce GP du Canada, qui le voit remporter sa 1ère victoire en carrière. Au Québec, cette victoire est chargée d’émotion : Alesi pilote la Ferrari n°=27, ce numéro cher à Gilles Villeneuve, l’enfant chéri de Berthieville décédé en 1982. C’est un Alesi en larmes qui est ramené aux stands par Schumacher, après que sa Ferrari l’a trahi … mais pour une fois après la ligne d’arrivée. Enfin, après 91 grands prix, Alesi goûte à la joie d’une victoire en F1. Cette consécration aurait pu même se répéter à Monza (il est stoppé à 8 tours de l’arrivée par un roulement de roue défaillant) et au Nürburgring (où il est dépassé à 2 tours du but par un Schumacher en état de grâce). Ce fin de championnat est aussi marqué par son engagement par Benetton-Renault, après que Jean Todt l’ai limogé pour le remplacer par Michael Schumacher. Alesi termine ce championnat 5ème, avec 42 points.

Le feuilleton Alesi-Ferrari s’achève, un nouveau débute. Alesi retrouve chez Benetton Gerhard Berger, remplacé chez Ferrari par Eddie Irvine. Ce sera la meilleure année pour Alesi, mais une année encore une fois marquée par la malchance. L’Avignonnais termine 4ème du championnat avec 47 points (c’est tout de même peu compte tenu du statut de champion en titre de son équipe). Il signe 8 podiums, mais passe encore une fois à côté de la victoire. C’est à Monaco cette fois-ci que se joue le drame. Dans des conditions piégeuses, Alesi est 2ème derrière Hill lorsque le Britannique explose son V10 Renault au 40ème tour. Sous les hourras de la foule, Jean prend la tête … avant de renoncer, encore une fois, suite au bris d’une suspension. Il laisse la mort dans l’âme la victoire à son compatriote Olivier Panis.

Sa 2ème année chez Benetton sera moins bonne, marquée par de nombreuses tensions avec son patron d’écurie Flavio Briatore. Alesi signe 5 podiums, ainsi qu’une pôle à Monza (où il est follement acclamé). Mais encore une fois, Alesi doit laisser filer la victoire et se contenter d’une 2ème place. Au terme de la saison, Alesi est 4ème avec 36 points, tandis que Berger est 5ème avec 27 points mais en ayant remporté le GP d’Allemagne. A la surprise générale, Jean Alesi annonce son arrivée chez Sauber-Petronas en vue de l’année 1998.

Après avoir, pendant de nombreuses saisons, navigué en haut de tableau, Alesi doit faire connaissance avec le ventre mou du peloton. La Sauber n’est pas une mauvaise voiture, et Jean s’illustre à de nombreuses reprises au cours de l’année. Mais sa fiabilité désastreuse l’empêche de concrétiser ses bons débuts de course. Alesi inscrit 9 petits points, avec en point d’orgue la 3ème place du terrifiant GP de Belgique.

1999 ? La même que 1998, mais en pire ! Jean Alesi ne pourra inscrire que 2 petits points, la faute encore une fois à la fragilité de sa monture. Lassé de ces casses à répétition, Alesi annonce à la fin de l’été son départ de chez Sauber, pour rejoindre son grand ami Alain Prost (il est le parrain d’un des enfants de Jean Alesi) dans son équipe.

Jean Alesi, Alain Prost, Peugeot. Sur le papier, cette association a de la « gueule ». A l’aube du 3ème millénaire les Bleus nourrissent de grandes ambitions, qui sont bien vite détruites. La saison 2000 tourne à l’humiliation pour l’équipe Prost qui n’inscrit aucun point et termine dernière au classement. Performances déplorables, fiabilité à revoir, jamais Alesi n’a pu se mêler à la lutte pour les points (à l’exception de Monaco où il était 7ème avant d’abandonner). L’humiliation est trop grande pour Peugeot qui met fin à son aventure en F1, Alain Prost remplace les blocs Sochaliens par des moteurs Ferrari ancienne génération rebadgés Acer.

Paradoxalement, l’année 2001 est bien meilleure que l’année 2000 pour Prost et Alesi, elle marquera pourtant la fin, brutale, de leur collaboration. Si en début d’année la monoplace n’est pas la plus rapide, elle fait preuve en revanche d’une remarquable fiabilité. Fiabilité récompensée à Monaco où Alesi termine 6ème, marquant son premier point depuis 1 an et demi ! Et rebelote deux semaines plus tard où Alesi, survolté, prend la 5ème place du GP du Canada à Montréal ! Après une ultime 6ème place à Hockenheim, Alesi quitte le navire Prost GP. Le feu couvait depuis plusieurs semaines, les tensions devenaient trop fortes entre les deux hommes. Alesi trouva refuge chez son ancien employeur en F3000, Jordan. 6ème à Spa, Jean Alesi annonce ensuite la fin de sa carrière en F1, une carrière qui prendra fin à Suzuka sur une violente sortie de piste. Coïncidence troublante, les carrières d’Alesi et Prost GP auront pris fin au même moment …

Alesi se tourne alors vers le championnat d’Allemagne de Supertourisme, le prestigieux DTM. En 4 saisons, Jean cumule 4 victoires chez Mercedes mais ne parvient pas à s’imposer comme un candidat en titre. Fin 2005 il annonce sa retraite sportive, malgré une dernière incartade dans le championnat Speedcar Series, auquel il a ardemment contribué. Ce championnat de stock-cars à l’européenne regroupe d’anciennes gloires de la F1, et Jean y remportera 2 victoires. Il est aujourd’hui le capitaine de l’équipe de France FFSA.

La carrière de Jean Alesi fut marquée pendant bien longtemps du sceau de la malchance. La malchance chez Ferrari surtout, mais aussi un choix de carrière malheureux qui l’a vu rejoindre la Scuderia au plus mauvais moment alors que l’équipe Williams en pleine ascension l’avait initialement engagé. Néanmoins, malgré un palmarès peu étoffé, Alesi a su trouver dans le cœur des aficionados de F1 une place de choix, et notamment chez les Tifosis. Certes Lauda et Schumacher étaient acclamés par les supporters de Ferrari pour leurs nombreuses victoires. Mais ils sont deux et seulement deux à être aussi follement acclamés, malgré un palmarès limité : Gilles Villeneuve, et Jean Alesi qui a repris le numéro 27 du petit québécois chez Ferrari. Alesi, c’est un peu notre Gilles Villeneuve français. Un pilote généreux, fougueux, spectaculaire et enthousiasment. Le dernier des mohicans en quelque sorte, le dernier de cette lignée de pilotes qui n’avaient pas froid aux yeux, qui ne se posaient pas de questions. Alors bien entendu, il y’avait quelques accidents et sorties. Mais bien loin de cette image de pilote dangereux et irréfléchi que l’on a voulu créer en France. Comme quoi notre beau pays ne sait pas toujours reconnaître à leur juste valeur nos champions …